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Les "27" prient Theresa May de revoir son plan de sortie de l'UE

Theresa May, comme son homologue allemande Angela Merkel, a prévenu que beaucoup de travail restait à accomplir. /Photo prise le 20 septembre 2018/REUTERS/Leonhard Foeger

par Alastair Macdonald, Elizabeth Piper et Gabriela Baczynska

SALZBOURG, Autriche (Reuters) - Les Européens sont disposés à voir échouer les négociations sur le Brexit si Londres ne fait aucune concession sur la question du commerce et celle de la frontière irlandaise, ont prévenu jeudi les dirigeants de l'Union, tout en se disant déterminés à tout faire pour qu'un accord soit conclu dès le mois prochain.

Interrogé sur la perspective d'un échec des négociations, le président de la Commission, Jean-Claude Juncker, a assuré que toutes les pistes avaient été envisagées. "Don't worry, be happy", a-t-il lancé à la presse en plaisantant.

A Salzbourg, où se déroulait mercredi et jeudi un Conseil européen informel, la Première ministre britannique a promis d'avancer de nouvelles propositions pour résoudre l'équation irlandaise et éviter le rétablissement d'une frontière physique entre l'Irlande du Nord et la République d'Irlande.

Elle a toutefois également prévenu qu'elle était prête à surmonter une situation dans laquelle aucun accord ne serait signé.

La dirigeante britannique a redit que son projet de "Chequers", un livre blanc qui aborde à la fois la question du commerce et celle de la frontière irlandaise, était la seule solution viable.

PROJET INACCEPTABLE

Cette opinion n'est pas celle de ses interlocuteurs. Donald Tusk, président du Conseil européen, a ainsi jugé que la proposition de Chequers ne fonctionnerait pas, tandis que le président français Emmanuel Macron évoquait un projet inacceptable en l'état.

"C'est une bonne chose et c'est une démarche courageuse de la Première ministre", a consenti Emmanuel Macron.

"Mais, de manière très claire, je veux également dire, et ça a fait l'objet d'un consensus ce midi, que les propositions faites en l'état aujourd'hui ne sont pas acceptables, tout particulièrement dans le domaine économique et en l'état le plan Chequers ne saurait être un plan à prendre ou à laisser."

Présenté en juillet, le projet britannique recommande de créer une "zone de libre-échange pour les marchandises" permettant au Royaume-Uni d'avoir un "règlement commun pour tous les biens" dans un territoire douanier commun.

Les modalités de fonctionnement de cette zone seraient négociées avec l'UE pendant la période de transition de vingt mois qui suivra le Brexit, de mars 2019 à décembre 2020. Grâce à cette solution qui concernerait l'ensemble du Royaume-Uni, aucun contrôle de marchandises ne serait nécessaire à la frontière irlandaise et le Royaume-Uni pourrait fixer ses propres droits de douane et conclure de nouveaux accords de libre-échange.

Les négociateurs européens ont deux objections.

La première, c'est que ce plan dit de Chequers - du nom de la villégiature officielle des chefs du gouvernement britannique - offrirait selon eux au Royaume-Uni un accès déloyal au marché unique européen.

La seconde, c'est qu'ils réclament, à la demande expresse du gouvernement irlandais unanimement appuyé par le reste de l'UE, une assurance en cas d'échec de ces pourparlers sur la future relation commerciale.

MOMENT DE VERITE

Le président du Conseil européen Donald Tusk a prévenu que le sommet prévu le 18 octobre à Bruxelles serait un moment de vérité qui permettra de savoir si les deux parties en présence sont capables de surmonter leurs divergences.

Si cette étape est franchie avec succès, Bruxelles et Londres formaliseront leur accord pour un sommet extraordinaire un mois plus tard.

Theresa May, comme son homologue allemande Angela Merkel, a prévenu que beaucoup de travail restait à accomplir.

La dirigeante britannique doit qui plus est convaincre le Parti conservateur dont elle est issue qu'elle reste en mesure de réussir la sortie du Royaume-Uni de l'Union européenne alors que ses adversaires sont de plus en plus remuants.

"Il est clairement apparu qu'il faudra faire des progrès significatifs d'ici octobre et que nous entendons aboutir en novembre", a déclaré Angela Merkel.

"Mais il y a encore beaucoup de travail sur la question de l'évolution des relations commerciales. On ne peut appartenir au marché commun sans être membre du marché commun", a-t-elle dit.

(Avec Francois Murphy avec Jean-Baptiste Vey, Nicolas Delame pour le service français, édité par Jean-Philippe Lefief)