Les rebelles poussent leur avantage avant le sommet sur l'Ukraine

Restes d'une roquette dans une rue de Kramatorsk. Sept civils ont été tués et 26 autres personnes ont été blessées mardi dans des tirs de roquettes sur la ville où est installé le quartier général de l'armée ukrainienne pour l'est de l'Ukraine. /Photo prise le 10 février 2015/REUTERS/Gleb Garanich

par Aleksandar Vasovic et Gleb Garanich VOUHLEHIRSK/KRAMATORSK, Ukraine (Reuters) - L'espoir de voir aboutir de nouveaux pourparlers de paix à Minsk sur le conflit ukrainien s'est amenuisé avec la poursuite de combats acharnés sur le terrain, où les rebelles cherchent à pousser leur avantage. Des tirs de roquettes meurtriers sur Kramatorsk, une ville sous contrôle gouvernemental éloignée du front, ont coûté la vie mardi à sept civils et les forces séparatistes pro-russes ont intensifié leurs efforts pour isoler le noeud stratégique de Debaltseve. Les conseillers diplomatiques des dirigeants russe, ukrainien, français et allemand se sont retrouvés à Minsk pour préparer le sommet quadripartite de mercredi soir qui se tiendra, a prévenu Vladimir Poutine, si "nous parvenons à régler certains points dont nous avons discuté intensément ces derniers jours". Une source diplomatique citée par l'agence russe RIA a dit qu'il n'était pas prévu de signer de document dans la capitale biélorusse et que les pourparlers porteraient notamment sur un retrait des armements lourds, la mise en place d'une zone démilitarisée et l'établissement d'un dialogue entre Kiev et les séparatistes. La France a déjà fait état d'une proposition de créer une zone démilitarisée de 50 à 70 kilomètres de part et d'autre de la ligne de démarcation entre pro-russes et Ukrainiens. Des responsables européens disent cependant n'avoir qu'un très mince espoir d'obtenir un arrêt des hostilités, observant que les rebelles et Moscou ont peu de raisons de cesser les combats alors qu'ils progressent sur le terrain. Le conflit, qui a débuté en avril 2014, a fait plus de 5.000 morts. "ON NE LES LAISSERA PAS SORTIR" A Vouhlehirsk, une localité conquise la semaine dernière par les séparatistes, retentissaient mardi les salves d'artillerie tirées par les deux camps alors que les rebelles s'efforcent d'encercler les forces gouvernementales dans la ville voisine de Debaltseve, leur principal objectif. Les séparatistes affichent leur confiance et disent qu'ils ne s'arrêteront pas tant qu'ils n'auront pas piégé leur ennemi dans cette ville, important noeud ferroviaire et routier entre les bastions rebelles de Donetsk et Louhansk. "La bulle de Debaltseve est en train de se refermer. On ne les laissera pas sortir. Ils n'auront aucun moyen de s'en sortir", a déclaré le chef d'une unité de reconnaissance qui se présente lui-même sous son nom de guerre: Malich, qui veut dire "petit". Quand on l'interroge sur la perspective d'un cessez-le-feu très prochainement, Malich, qui dit être russe et non ukrainien, répond: "Nous sommes absolument contre. Ca leur donnerait du temps pour se regrouper. Nous les tenons maintenant." Au nord-ouest de Debaltseve, à une cinquantaine de kilomètres de la ligne de front, la ville de Kramatorsk, où l'armée gouvernementale a installé son commandement opérationnel pour l'est de l'Ukraine, a été touchée par deux roquettes qui ont fait sept morts et 36 blessés, selon les autorités régionales sous contrôle de Kiev. Le QG militaire ainsi qu'un quartier résidentiel ont été frappés. Les rebelles ont démenti avoir tiré sur la ville. CONTRE-OFFENSIVE À MARIOUPOL Sur le front sud-est, l'armée ukrainienne a annoncé avoir lancé une contre-offensive pour se libérer de la pression des séparatistes qui ont massé des forces autour de la ville portuaire de Marioupol (500.000 habitants), la plus grande ville de l'Est encore aux mains des forces gouvernementales. "Des unités de la garde nationale ont brisé les défenses ennemies (près de Marioupol) et sont passées à l'offensive", a déclaré le conseil de défense et de sécurité nationale. Peu de détails ont été fournis sur cette contre-offensive mais il est peu probable qu'elle soulage les autres fronts où les forces gouvernementales sont régulièrement repoussées par les rebelles. Selon Dmitro Timtchouk, un expert militaire ayant de bonnes sources au sein de l'armée de Kiev, les rebelles essaient désormais de couper la grande route - et principale voie d'approvisionnement des forces gouvernementales - qui relie Debaltseve à Logvynove, plus au nord. Andriy Lissenko, porte-parole de l'armée, a déclaré mardi qu'une attaque sur Logvynove avait été repoussée mais que les combats se poursuivaient dans cette zone. Sept soldats ukrainiens ont été tués au cours des dernières 24 heures, a déclaré un autre porte-parole militaire. La Russie, que l'Occident accuse de fournir les forces séparatistes en hommes, en armes et en munitions et qui dément toujours toute implication dans les combats en Ukraine, a annoncé mardi des manoeuvres d'une durée d'un mois impliquant 2.000 hommes à proximité de la frontière ukrainienne. La poursuite des combats aiguise le débat sur l'envoi d'armes à l'Ukraine, en particulier aux Etats-Unis. A l'issue d'une rencontre avec Angela Merkel lundi à la Maison blanche, Barack Obama a dit que la livraison d'armes, réclamée par le camp républicain, faisait partie des options à l'étude, mais qu'aucune décision n'avait encore été prise. (Jean-Stéphane Brosse pour le service français)