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Bagdad refuse tout dialogue sur une sécession du Kurdistan

Le gouvernement de Bagdad exclut toute discussion portant sur la sécession du Kurdistan irakien, a déclaré lundi soir le Premier ministre Haïdar al Abadi (photo) en réaction au référendum sur l'indépendance organisé par Erbil. /Photo diffusée le 24 septembre 2017/REUTERS

par Maher Chmaytelli ERBIL, Irak (Reuters) - Le gouvernement de Bagdad exclut toute discussion portant sur la sécession du Kurdistan irakien, a déclaré lundi soir le Premier ministre Haïdar al Abadi en réaction au référendum sur l'indépendance organisé par Erbil. Le taux de participation a atteint 72% et le "oui" devrait dépasser les 90%, a rapporté la chaîne de télévision Roudaou, basée à Erbil. Les résultats définitifs sont attendus mercredi. Erbil a célébré jusqu'à la nuit cette consultation historique à laquelle s'opposent l'Irak mais aussi tous les pays voisins de la région, Turquie, Iran, Syrie, qui craignent des tensions sécessionnistes avec leurs propres minorités kurdes. La capitale du Kurdistan autonome s'est parée des couleurs du drapeau kurde - rouge, blanc, vert -, des fusées d'artifice ont été tirées et les habitants ont dansé sur les places. La ville pétrolière de Kirkouk, qui n'appartient pas au Kurdistan autonome mais est contrôlée par des forces kurdes depuis 2014 et avait décidé de participer au référendum, a levé un couvre-feu nocturne instauré pour éviter des incidents avec les communautés arabe et turkmène. Le président du gouvernement régional du Kurdistan (KRG), Massoud Barzani, a souligné que le vote n'était pas contraignant mais qu'il lui fournirait un mandat pour négocier avec Bagdad et ses voisins un processus pacifique de sécession. Quelques heures après la clôture du vote, le pouvoir central irakien a toutefois persisté dans son refus d'en débattre. "Nous ne sommes pas prêts à discuter ou à avoir un dialogue sur les résultats de ce référendum car il est anticonstitutionnel", a déclaré Haïdar al Abadi dans un discours retransmis à la télévision lundi soir. "Le référendum s'est déroulé sans la moindre reconnaissance internationale (...) Nous n'accepterons pas son résultat, pas plus que la communauté internationale ou toute autre partie." ERDOGAN RENOUVELLE SES MENACES Le président turc Recep Tayyip Erdogan n'a quant à lui exclu mardi aucune option - économique ou militaire - en réplique au référendum de lundi. Il a accusé Massoud Barzani de "trahison" et de nouveau menacé de fermer le robinet au pétrole kurde qui s'écoule via la Turquie. Les électeurs devaient répondre "oui" ou "non" à la question: "Voulez-vous que la Région du Kurdistan et les zones kurdes en dehors de la Région du Kurdistan deviennent un pays indépendant?" Les Kurdes irakiens considèrent ce scrutin comme le fruit légitime de leur contribution à la lutte contre l'Etat islamique, qui s'est emparé d'un tiers de l'Irak à la mi-2014. Les Kurdes, qui sont aujourd'hui 30 millions, se sont trouvés disséminés en Irak, en Iran, en Syrie et en Turquie après le démantèlement de l'empire ottoman à l'issue de la Première Guerre mondiale. Le département d'Etat américain s'est dit "profondément déçu" par la tenue de ce référendum, tout en assurant que cela n'affecterait pas la "relation historique" entre les Etats-Unis et les habitants de la région du Kurdistan irakien. (Bertrand Boucey et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)