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Le Pen promet Matignon à Dupont-Aignan

PARIS (Reuters) - Marine Le Pen a annoncé samedi son intention de nommer le souverainiste Nicolas Dupont-Aignan Premier ministre en cas de victoire à l'élection présidentielle en vertu d'une accord de gouvernement qui prévoit des inflexions au programme du Front national. Le compromis scellé comporte six "engagements", marquant autant d'amendements au projet du FN, notamment concernant la fin de l'euro en tant que monnaie unique, qui n'est "pas un préalable à toute politique économique". "Cette alliance pour le pays n'est pas une alliance de circonstance. C'est la grande alliance patriote et républicaine qui incarne la recomposition que le pays attend", a déclaré la candidate du FN lors d'une conférence de presse commune avec son nouvel allié, venu de la droite classique. "Présidente de la République, je nommerai Nicolas Dupont-Aignan Premier ministre de la France, appuyé par une majorité présidentielle cohérente", a ajouté Marine Le Pen, qui sera opposée au second tour le 7 mai à Emmanuel Macron. "C'est un jour historique", a pour sa part estimé Nicolas Dupont-Aignan, arrivé sixième du premier tour de la présidentielle, dimanche dernier, avec 4,70% des voix. Au-delà de son capital politique, ce pourfendeur de l'Union européenne permet pour la première au parti d'extrême droite de sortir de son isolement, qui l'a jusqu'à présent empêché de briser le "plafond de verre" aux élections nationales. Son soutien, officialisé vendredi, marque un virage dans la trajectoire du député de l'Essonne, qui a entamé sa carrière politique au RPR, l'ancêtre des Républicains d'aujourd'hui, revendique toujours l'héritage du général de Gaulle et a multiplié dans le passé les critiques à l'encontre du FN. "Chez Debout la France (le parti qu'il a fondé-NDLR), il n'y a pas d'arrière-boutique d'extrême droite comme au Front national", déclarait-il en mars sur France 2. Depuis le premier tour, Marine Le Pen et lui-même se sont rencontrés à plusieurs reprises pour négocier "une alliance patriote et républicaine". INFLÉCHISSEMENT SUR L'EURO "La transition de la monnaie unique à la monnaie commune européenne n'est pas un préalable à toute politique économique, le calendrier sera adapté aux priorités et défis immédiats que le gouvernement de la France devra relever", peut-on lire dans ce documents en six points. "Ça signifie qu'il y a beaucoup de mesures à mettre en oeuvre qui, toutes, ne dépendent pas de la transition de la monnaie unique vers la monnaie commune. Je pense (...) à la mise en oeuvre immédiate des budgets du CICE et des budgets qui sont actuellement accordés aux grands groupes pour la baisse des charges vers les TPE-PME", a précisé Marine Le Pen. Dans son programme, elle prévoyait l'organisation d'un référendum sur l'appartenance de la France à l'UE dans les six mois suivant son éventuelle accession à l'Elysée. La présidente en congé du FN a récemment infléchi son discours à propos de cette mesure loin de faire consensus dans l'opinion, notamment au sein de l'électorat âgé qui lui fait défaut, au point de la faire disparaître de la profession de foi publiée en vue du second tour. Dans une interview parue samedi dans le journal Sud Ouest, elle estime que le processus de sortie de l'euro pourrait durer un an, voire un an et demi. "Il y aura un long débat, vraisemblablement peut-être de plusieurs mois ou peut-être plusieurs années avant que nous prenions cette décision historique", a dit pour sa part Marion Maréchal-Le Pen en marge de la conférence de presse. Dans le cadre de la feuille de route signée avec le FN, Nicolas Dupont-Aignan a par ailleurs demandé que soit reconnu le vote blanc et que les étrangers vivant en France puissent scolariser leurs enfants gratuitement. "Le courage de Nicolas Dupont-Aignan, qui est un peu le premier de cordée, va peut-être donner du courage à tous les autres et les rassurer sur notre capacité à mener des alliances, à faire un programme commun", selon Marion Maréchal-Le Pen. Les dirigeants frontistes espèrent, d'ici le 7 mai, obtenir d'autres ralliements, comme ceux de l'ancien député de droite Philippe de Villiers ou de certains membres des Républicains, un parti déchiré sur la marche à suivre dans les semaines et mois à venir. Les sondages réalisés avant l'annonce du soutien de Nicolas Dupont-Aignan plaçaient Emmanuel Macron en tête, avec environ 60% des intentions de vote. (Simon Carraud, édité par Gilles Trequesser)