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Le "oui mais" des députés socialistes au plan de Valls

Le plan de réduction des dépenses publiques présenté mercredi par Manuel Valls suscite nombre critiques au Parti socialiste mais ses dirigeants se disent certains qu'il y aura une majorité pour voter le programme de stabilité budgétaire, le 30 avril. /Photo prise le 8 avril 2014/REUTERS/Charles Platiau

par Emile Picy et Emmanuel Jarry PARIS (Reuters) - Le plan de réduction des dépenses publiques présenté mercredi par Manuel Valls suscite nombre critiques au Parti socialiste mais ses dirigeants se disent certains qu'il y aura une majorité pour voter le programme de stabilité budgétaire, le 30 avril. Cet effort de 50 milliards d'euros en trois ans est la clef de la trajectoire de réduction des déficits publics sur laquelle la France s'est engagée, avec un objectif à 3% du PIB en 2015. Du côté des défenseurs d'une ligne orthodoxe, le député Eduardo Rihan-Cypel estime que cette "vérité" doit être dite aux Français "les yeux dans les yeux" - "C'est maintenant que le travail commence (...) Je suis tout sauf inquiet." Pour Dominique Lefebvre, vice-président de la commission des Finances de l'Assemblée, l'important était de confirmer le cap des 3% en 2015 car en dévier serait "reculer pour mieux sauter". "Ce sont des mesures courageuses, qui protègent les plus modestes", a-t-il déclaré à Reuters. Selon Valérie Rabault, nouveau rapporteur de la commission, la réaffirmation de la promesse de création de 60.000 postes dans l'Education nationale ne suffira cependant pas à apaiser les inquiétudes au sein du groupe socialiste. "Nous allons bien évidemment engager une discussion avec le gouvernement", a-t-elle déclaré à Reuters. Le prolongement du gel du point d'indice de la fonction publique, le gel des retraites de base et complémentaires durant un an et le report jusqu'en octobre 2015 de la revalorisation d'autres prestations et ont du mal à passer, notamment dans l'aile gauche du PS. LA GAUCHE DU PS SE DISTINGUE "Les seules nouvelles annonces sont des ponctions au détriment du pouvoir d'achat des couches populaires et moyennes", déplore la sénatrice Marie-Noëlle Lienemann. Après la déroute socialiste aux élections municipales de mars, "on peut penser que ce n'était pas tout à fait ça le message des urnes", a pour sa part déclaré à Reuters Laurent Baumel, animateur de "La gauche populaire". Christian Paul, proche de la maire de Lille, Martine Aubry, juge "inacceptables en l'état" les annonces de Manuel Valls. "D'ici le 30 les parlementaires vont travailler d'arrache-pied pour revoir cette copie qui ne correspond ni aux nécessités du moment, ni aux engagements que nous avions pris", renchérit Pouria Amirshahi, animateur du courant "Un monde d'avance". Sans être aussi sévères, d'autres élus ont averti qu'ils tenteraient également d'infléchir la position du gouvernement. "Je suis surpris par ces annonces. Je souhaite que le Premier ministre vienne en discuter avec le groupe", a ainsi déclaré Yann Galut, autre représentant de l'aile gauche du PS. Jean-Marc Germain, un "aubryste" qui juge trop brutal et menaçant pour la croissance le plan d'économies annoncé, demande "une autre trajectoire" et avertit : "Le vrai rendez-vous, ce sera la loi de finances et la loi de financement de la Sécurité sociales. Là, nous ferons des contre-propositions." Pour Thierry Mandon, porte-parole du groupe socialiste, le gouvernement "cherche un chemin, qui est difficile, entre le courage que demande un plan d'économies sans précédent dans notre pays et la volonté de justice sociale". "Nous n'avons pas les moyens aujourd'hui de juger si le gouvernement a trouvé cet équilibre", ajoute-t-il. "Et nous, groupe socialiste, nous y veillerons particulièrement." Il rappelle qu'entre le programme de stabilité et les premiers éléments de sa mise en oeuvre, dans le cadre d'un projet de loi de finances rectificative, il y aura trois mois de travail parlementaire "pour améliorer" les mesures annoncées. APPEL À L'UNITÉ Ces réactions ont irrité le président du groupe socialiste, Bruno Le Roux, qui a lâché devant la presse : "Je suis atterré qu'un certain nombre de députés aient soit un ego démesuré, soit une conscience politique proche de zéro." Il s'est cependant dit certain que Manuel Valls obtiendrait une majorité le 30 avril sur le programme de stabilité. "Les onze (députés PS) qui n'ont pas voté la confiance la semaine dernière, je ne les vois pas voter le programme de stabilité", nuance Thierry Mandon, qui croit cependant, lui aussi, "qu'il y aura une majorité". Dans les couloirs de l'Assemblée, la ministre de l'Ecologie, Ségolène Royal, a appelé les élus PS à ne pas prendre "de postures pour essayer de se démarquer d'un effort collectif". "Pas une voix ne doit manquer", a-t-elle lancé, faisant ainsi écho à l'appel au rassemblement et à l'unité lancé quelques instants plus tôt dans l'hémicycle par Manuel Valls. Ce n'est de toute évidence pas sur ses anciens alliés d'Europe Ecologie-Les Verts (EELV) qu'il peut compter. Ceux-ci ont dénoncé dans un communiqué un plan d'économies synonyme selon eux d'iniquité, d'austérité et d'inefficacité et "incompatible avec la transition écologique et sociale". (Edité par Sophie Louet)