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Le Labour exclut tout accord avec les nationalistes écossais

par Andrew Osborn LONDRES (Reuters) - Le Parti travailliste britannique a exclu dimanche de conclure un accord post-électoral avec les nationalistes écossais qui constituerait, selon ses rivaux conservateurs, le point de départ de la plus grave crise constitutionnelle du Royaume-Uni depuis l'abdication d'Edouard VIII en 1936. Cette mise au point formulée par le chef du Labour Ed Miliband vise à contrer ce qui est devenu un angle d'attaque majeur du Premier ministre David Cameron en vue des élections législatives du 7 mai, qui s'annoncent comme le scrutin le plus indécis depuis les années 1970. Les enjeux ont rarement été aussi importants pour l'avenir du pays: en cas de victoire, le chef des Tories David Cameron promet un référendum sur l'appartenance du Royaume-Uni à l'Union européenne; les nationalistes écossais proposent quant à eux un accord aux travaillistes qui fait craindre à leurs adversaires une nouvelle consultation sur l'indépendance de l'Ecosse après le référendum du 18 septembre dernier. Le Labour et les conservateurs étant au coude à coude dans la plupart des sondages et semblant dans l'incapacité d'obtenir seuls une majorité absolue, David Cameron a changé d'axe dans sa campagne, délaissant son bilan économique pour insister sur le risque d'un éclatement du pays en cas d'alliance Labour-SNP (Parti national écossais). Ed Miliband s'était jusqu'alors contenté d'exclure la formation d'une coalition gouvernementale avec le SNP de Nicola Sturgeon, tout en laissant ouverte la possibilité d'un accord "de confiance et de soutien" avec les nationalistes. Dimanche, sur les ondes de la BBC, il est allé plus loin, rejetant tout accord informel pour obtenir leur soutien à un gouvernement de coalition dans le cas où son parti remporterait les élections du 7 mai sans majorité. "PAS DE COALITION, PAS DE RAPPROCHEMENT" "Cela ne m'intéresse pas de passer des accords (avec le SNP), non. (...) Je veux être clair à ce sujet. Pas de coalition, pas de rapprochement. Je ne passerai pas d'accord avec le SNP", a-t-il insisté. Ce changement tactique, qui exclut de fait pour les travaillistes la possibilité de gouverner en minorité en s'appuyant sur le soutien au cas par cas du SNP à la Chambre des communes, réduit la marge de manoeuvre de Miliband. Il montre également que le nouveau message délivré par les conservateurs porte ses fruits, en particulier auprès des électeurs anglais inquiets de voir les Ecossais peser sur la politique nationale. En cas de victoire sans majorité, les travaillistes seraient alors contraints d'adopter une nouvelle stratégie: gouverner en mettant au défi le SNP, également à gauche sur l'échiquier politique, de le renverser. Le Labour parierait alors que les nationalistes écossais ne se risqueraient pas ouvrir ainsi la voie à un retour des conservateurs au pouvoir. Le parti de Cameron, qui peinait jusque-là à convaincre sur le terrain de ses résultats de politique économique, multiplie désormais les mises en garde sur une alliance Labour-SNP. La ministre de l'Intérieur Theresa May a déclaré dimanche qu'un tel accord déclencherait la pire crise depuis le renoncement au trône d'Edouard VIII en 1936, un épisode qui ébranla la classe dirigeante. Ed Miliband et Nicola Sturgeon "donneraient le ton, des gens qui ne veulent pas que le Royaume-Uni existe et veulent détruire notre pays", a-t-elle dit. "Les gens auraient vraiment le sentiment de ne pas avoir voté pour ça, et auraient beaucoup de difficultés à l'accepter. Cela soulèverait des questions de légitimité. Beaucoup d'Anglais remettraient cela en question." Dans une tribune publiée par le Sunday Telegraph, David Cameron a prédit une hausse des impôts, de la dette, du crédit immobilier et du chômage en cas de rapprochement entre travaillistes et nationalistes écossais, parlant d'une "danse de la mort" entre les deux partis d'opposition. (Tangi Salaün et Jean-Stéphane Brosse pour le service français)