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La Turquie contredit Le Drian sur les enregistrements Khashoggi

La Turquie a affirmé lundi qu'un membre des services de renseignement français avait pris connaissance le 24 octobre d'enregistrements audio fournis par ses soins dans le cadre de l'enquête sur l'assassinat de Jamal Khashoggi, contredisant Jean-Yves Le Drian. /Photo prise le 22 octobre 2018/REUTERS/Zoubeir Souissi

ISTANBUL-PARIS (Reuters) - La Turquie a affirmé lundi qu'un membre des services de renseignement français avait pris connaissance le 24 octobre d'enregistrements audio fournis par ses soins dans le cadre de l'enquête sur l'assassinat de Jamal Khashoggi, contredisant Jean-Yves Le Drian.

Le ministre français des Affaires étrangères a déclaré lundi matin sur France 2 ne pas avoir connaissance de tels éléments sur la mort du journaliste saoudien, le 2 octobre au consulat d'Arabie saoudite à Istanbul. "Si le président turc a des informations à nous donner, il faut qu'il nous les donne."

Le président turc, Recep Tayyip Erdogan, a annoncé samedi que son pays avait transmis à la France, mais aussi aux Etats-Unis, à l'Allemagne et au Royaume-Uni des enregistrements concernant l'exécution de Jamal Khashoggi, opposant au régime wahhabite.

"Des preuves relatives au meurtre de Khashoggi (...) ont été transmises aux agences compétentes du gouvernement français", précise dans un communiqué le directeur de la communication de Tayyip Erdogan, Fahrettin Altun.

"Le 24 octobre, un représentant des services de renseignement français a écouté un enregistrement audio et pris connaissance d'informations détaillées, dont une transcription dudit enregistrement", ajoute-t-il.

Prié de dire s'il estimait que Recep Tayyip Erdogan mentait, le chef de la diplomatie française avait répondu sur France 2: "Ça veut dire qu'il a un jeu politique particulier dans cette circonstance."

"LA VÉRITÉ COMPLÈTE RESTE À ÉTABLIR"

Des propos jugés inacceptables par le représentant du président turc.

"Si la communication est mauvaise entre les différentes agences du gouvernement français, c'est aux autorités françaises - et non turques - de régler ce problème", a-t-il répliqué.

Le ministère français des Affaires étrangères a souligné par la suite que la pratique commune des autorités françaises, et de Jean-Yves Le Drian en particulier, était de s'abstenir de tout commentaire sur la nature des échanges avec la Turquie.

"Nous n'avons pas de commentaire à faire sur les enregistrements, pour des raisons de discrétion. On ne confirme ni n'infirme", a-t-on déclaré à Reuters.

"Les autorités compétentes en France et en Turquie sont en contact sur l'affaire Khashoggi depuis le début", mais "pour nous, la vérité complète reste à établir", explique-t-on.

"La vérité ne peut pas être que dans les enregistrements turcs. (...) On attend encore des éléments des Saoudiens et après, on verra", ajoute-t-on.

Le Premier ministre canadien, Justin Trudeau, a déclaré lundi à Paris, en marge du Forum pour la paix, que les services de renseignement canadiens avaient écouté des enregistrements ayant trait à l'assassinat du journaliste.

L'assassinat de Jamal Khashoggi, que Ryad a reconnu après deux premières semaines de dénégations, a soulevé une vague d'indignation dans le monde et braqué les projecteurs sur le prince héritier, Mohamed ben Salman, dit "MBS". Selon la version saoudienne, ce dernier n'a joué aucun rôle dans la mort du journaliste.

(Simon Carraud, Richard Lough et John Irish à Paris, Ali Kucukgocmen et Sarah Dadouch à Istanbul, Sophie Louet pour la version française)