Wall Street finit en baisse avec les tensions commerciales

par April Joyner

NEW YORK (Reuters) - La Bourse de New York a fini en baisse jeudi après la décision des Etats-Unis de taxer les importations d'acier et d'aluminium du Canada, du Mexique et de l'Union européenne, qui relance les craintes de guerre commerciale entre Washington et ses principaux alliés.

L'indice Dow Jones a chuté de 251,94 points, soit 1,02%, à 24.415,84 avec 29 de ses 30 composantes dans le rouge.

Le S&P-500, plus large, a perdu 18,74 points ou 0,69% à 2.705,27 alors que le Nasdaq Composite a limité son recul à 20,34 points (0,27%) pour finir à 7.442,18.

Sur le mois, le Dow Jones n'en a pas moins gagné 1,1%, le S&P 2,2% et le Nasdaq 5,3%, soit leur meilleure performance mensuelle depuis janvier. Pour le Russell 2000, qui regroupe des valeurs plus petites et tournées pour la plupart vers le marché américain, la hausse a même atteint 5,9%, la meilleure performance depuis septembre 2017.

Le secrétaire américain Wilbur Ross a annoncé l'instauration ce vendredi de droits de douane de 25% sur l'acier et de 10% sur l'aluminium en provenance de l'Union européenne, du Canada et le Mexique, mettant fin à deux à deux mois d'exemptions accordées par le président Donald Trump.

Le Mexique et le Canada ont immédiatement annoncé des taxes équivalentes sur les importations américaines et l'UE a promis des "contre-mesures" rapides, tout en décidant de saisir l'Organisation mondiale du Commerce.

"Le marché craint des représailles et attend de voir surtout ce qui va venir de l'UE", déclare Zhiwei Ren, gérant chez Penn Mutual Asset Management à Horsham, en Pennsylvanie. "Mais plus généralement c'est encore une manoeuvre tactique des Etats-Unis qui utilisent les tarifs douaniers comme un levier pour d'autres négociations."

"C'est de l'incertitude en plus", juge de son côté Shawn Cruz, stratège chez TD Ameritrade à Chicago. "Les tarifs ne concernent plus seulement la Chine mais aussi l'Amérique du Nord et la zone euro. Le marché est encore plus sensible à cela."

Les frictions entre Washington et ses partenaires commerciaux ont agité les marchés financiers depuis l'annonce en mars des projets de tarifs sur l'acier et l'aluminium.

Le président Trump a aussi lancé la semaine dernière une enquête sur les importations automobiles et, selon un journal allemand, il serait décidé à bannir les grosses berlines allemandes sur le sol américain.

Caterpillar et Boeing, sensibles aux tensions commerciales, ont reculé de respectivement 2,28% et 1,68%, contribuant à la forte baisse du Dow Jones.

Les représailles mexicaines sur les ventes américaines de cuisses de porc, de certains fruits et de fromages ont pesé sur les groupes agroalimentaires Tyson Foods (-3,92%), Kraft Heinz (-2,31%) et Mondelez (-1,03%). L'indice S&P des produits alimentaires transformés et de la viande a perdu 2,03% avec ses 11 composantes dans le rouge.

A l'inverse, le sidérurgiste US Steel a gagné 1,71% mais son indice sectoriel S&P 1500 Steel (-0,12%) a cédé ses gains après l'annonce des contre-mesures mexicaines qui concernent aussi l'acier.

LES TECHS FONT DE LA RÉSISTANCE

Neuf des 11 grands indices sectoriels S&P ont fini en repli, les seules hausses - modestes - étant pour les services aux collectivités (+0,11%), aidés par leur profil défensif, et les technologiques (+0,02%).

Alphabet et Facebook, en hausse de respectivement 2,09% et 2,19%, ont permis au Nasdaq de résister, profitant selon des analystes de premiers retours selon lesquels l'entrée en vigueur du nouveau règlement européen sur la protection des données ne leur fait aucun tort.

La plus forte hausse du S&P-500 a été pour General Motors, qui a bondi de 12,87% après d'un investissement de 2,25 milliards de dollars (1,92 milliard d'euros) du japonais Softbank dans sa division consacrée au développement de véhicules autonomes, GM Cruise.

La seule hausse, symbolique, du Dow a été pour le géant des cartes de crédit Visa qui a grignoté 0,06%.

A la baisse, les distributeurs discount Dollar General (-9,37%) et Dollar Tree (-14,28%) ont été lourdement sanctionnés après l'annonce de ventes trimestrielles qui ont déçu les investisseurs.

La chaîne d'habillement Guess a plongé de 19,44% après ses résultats publiés mercredi soir, sa plus mauvaise séance depuis août 2012, et Abercrombie & Fitch a lâché 7,34% dans la crainte d'une mauvaise surprise lors de sa publication trimestrielle vendredi.

L'EURO POURSUIT SON REBOND

Les volumes d'échange ont été étoffés avec 8,09 milliards de titres échangés contre 6,83 milliards la veille et une moyenne de 6,63 milliards sur les 20 dernières séances.

Sur le marché des changes, le dollar a progressé face au dollar canadien et au peso mexicain mais il a reculé contre l'euro après l'annonce de formation d'un gouvernement en Italie, qui évite la convocation d'élections anticipées.

La monnaie unique, déjà en hausse de 1,1% mercredi, a encore gagné 0,3% pour revenir juste sous 1,17 dollar alors qu'elle avait touché un plus bas de 10 mois de 1,1510 mardi. "L'Italie est redevenue un problème mais un problème qui semble contenu et représente moins un risque pour l'économie mondiale", explique Daniel Katzive, responsable de la stratégie changes de BNP Paribas à New York.

Les annonces en Italie ont aussi entraîné une détente des rendements obligataires qui avaient auparavant monté.

L'or a cédé 0,02% à 1.298,73 dollars. Sur le mois, il a perdu environ 1%, son deuxième mois consécutif de baisse.

(avec Medha Singh à Bangalore, Véronique Tison pour le service français)