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Le distributeur de fonds Calastone passe à la blockchain

par Tom Wilson et Simon Jessop

LONDRES (Reuters) - La fintech Calastone, spécialiste de la distribution de fonds d'investissement, a dit lundi qu'elle allait recourir à la technologie des chaînes de blocs (blockchain) à compter du mois de mai pour l'ensemble des transactions qu'elle traite, une initiative qui pourrait réduire les coûts pour l'industrie de la gestion de plusieurs milliards d'euros par an.

Basée à Londres, Calastone offre des services de back et de middle office à plus de 1.700 distributeurs de fonds et sociétés de gestion comme JP Morgan Asset Management, Schroders ou Invesco pour les aider à commercialiser leurs produits auprès de banques et de conseillers financiers.

Avec ce basculement, plus de neuf millions de messages par mois entre ces différentes contreparties, représentant des montants échangés de plus de 170 milliards de livres sterling (192 milliards d'euros), seront effectués grâce à la blockchain.

Cette technologie qui sous-tend les cryptomonnaies comme le bitcoin trouvera ainsi sa première application de grande envergure dans le secteur financier alors qu'elle peine à être déployée à grande échelle dans un secteur d'activité majeur malgré tout l'engouement qu'elle suscite.

Actuellement, trois messages électroniques sont envoyés via le réseau Calastone entre les participants concernés lors de l'achat d'un fonds : un premier message pour passer l'ordre d'achat, un deuxième pour confirmer que le premier a bien été reçu et un troisième pour confirmer le prix.

Bien que plus fiable que les méthodes manuelles comme l'envoi de fax qu'utilisent encore certains acteurs du secteur, l'échange de messages électroniques reste compliqué et long.

Le passage à la blockchain pourrait permettre de réaliser jusqu'à 3,4 milliards de dollars de livres d'économies pour l'industrie de la gestion en intégrant les processus de négociation et de règlement, a dit Calastone en s'appuyant sur une étude du consultant Deloitte.

De telles économies seraient particulièrement bienvenues pour un secteur confronté aux pressions des investisseurs pour réduire les commissions, sa principale source de revenus, et à une montée des coûts liée au renforcement de la réglementation après la grande crise financière.

"Plus vous pouvez automatiser, plus vous réduisez les risques, plus vous simplifiez, plus vous pouvez accélérer", a dit Andrew Tomlinson, responsable du marketing de Calastone.

La blockchain est une technologie de base de données distribuées qui permet d'enregistrer des transactions d'une manière fiable, vérifiable et irréversible, en évitant les intermédiaires.

Ses partisans estiment qu'elle peut révolutionner de nombreux secteurs d'activité de la finance au transport maritime et en améliorant l'efficacité et la fiabilité des back office.

Des tests se sont multipliés aux cours des dernières années dans de nombreux domaines et notamment dans le secteur bancaire et financier. Mais peu de projets ont ensuite été véritablement déployés en partie du fait d'interrogations sur les coûts, le cadre réglementaire et la possibilité de passer à une exploitation à grande échelle.

Banques et sociétés de gestion s'inquiètent aussi de la sécurité de la blockchain, rappelle Matthias Hübner, consultant chez Oliver Wyman.

"Jusqu'à quel point la technologie est-elle sûre ? Y a-t-il un risque de fraude ? Est-ce que des données peuvent simplement être perdues ?", s'est-il interrogé.

Calastone n'en prévoit pas moins de basculer toutes les opérations de ses clients sur la blockchain.

Interrogé par Reuters, JP Morgan Asset Management, Schroders et Invesco, qui figurent dans la liste des clients que Calastone affiche sur son site internet, n'ont pas souhaité faire de commentaires.

Dans la dernière livraison de sa revue "Risk & Reward", Invesco consacre toutefois un long article aux technologies de la blockchain et à leurs implications pour la refonte du secteur de la gestion d'actifs.

En dehors du secteur financier, la majorité des projets utilisant la blockchain ont concerné des domaines relativement marginaux comme la billetterie ou les chaînes d'approvisionnement alimentaires.

D'autres ont plus récemment porté sur les matières premières, suggérant que la technologie se répand progressivement dans des secteurs majeurs.

Ainsi, de grandes compagnies pétrolières et des sociétés de négoce peuvent désormais effectuer des transactions sur le brut via une plate-forme basée sur la technologie blockchain. [nL8N1Y42V9]

(Marc Joanny pour le service français, édité par Veronique Tison)