Le départ d'Assad n'est plus la priorité américaine, dit Nikki Haley

La priorité de la politique syrienne des Etats-Unis n'est plus d'obtenir le départ du président Bachar al Assad, a annoncé jeudi l'ambassadrice des Etats-Unis auprès des Nations unies, Nikki Haley (photo). /Photo prise le 27 janvier 2017/REUTERS/Stephanie Keith

par Michelle Nichols NEW YORK (Reuters) - La priorité de la politique syrienne des Etats-Unis avec Donald Trump n'est plus d'obtenir le départ du président Bachar al Assad, a annoncé jeudi l'ambassadrice des Etats-Unis auprès des Nations unies, Nikki Haley. Cette déclaration marque une rupture par rapport à la position officielle de l'ancien président américain Barack Obama, qui a néanmoins progressivement mis l'accent sur la lutte contre l'organisation Etat islamique face à la progression territoriale des djihadistes depuis 2014 en Syrie mais aussi en Irak. Les alliés européens des Etats-Unis, dont la France, insistent quant à eux toujours sur une mise à l'écart de Bachar al Assad six ans après le début du soulèvement contre le régime syrien, devenu peu à peu un conflit avec de multiples belligérants soutenus par diverses puissances régionales ou internationales. "Vous choisissez vos batailles et quand vous regardez la situation, il s'agit de changer de priorités et notre priorité n'est plus de nous asseoir ici et de nous focaliser sur les moyens de faire partir Assad", a dit Nikki Haley devant un petit groupe de journalistes. "Pensons-nous qu'il est un obstacle? Oui. Allons-nous nous asseoir ici et concentrer nos efforts sur les moyens de le faire partir? Non", a-t-elle poursuivi. "Ce sur quoi nous allons concentrer nos efforts, c'est exercer des pressions afin que nous puissions commencer à mettre en oeuvre un changement en Syrie." Dans ses dernières années, l'administration Obama s'est efforcée de parvenir à un accord avec la Russie, soutien du régime syrien, qui aurait permis à terme le départ de Bachar al Assad. Elle a aussi toutefois basculé son attention sur la lutte contre l'organisation Etat islamique. Durant la campagne électorale aux Etats-Unis, Donald Trump a déclaré que sa priorité était davantage de vaincre les djihadistes que de pousser Bachar al Assad vers la sortie. ACCEPTER LES FAITS SUR LE TERRAIN Le président républicain a réaffirmé cette priorité en demandant, via un décret signé huit jours après son investiture, à l'état-major des forces américaines de préparer un plan pour vaincre l'Etat islamique. "Nous ne pourrons pas forcément nous focaliser sur Assad comme l'a fait la précédente administration", a ajouté Nikki Haley. "Notre priorité est de regarder vraiment comment nous pouvons faire progresser les choses, avec qui nous devons travailler pour améliorer véritablement le sort des gens en Syrie." Un responsable de l'administration Trump a déclaré à Reuters que ces déclarations de l'ambassadrice américaine à l'Onu relevaient d'un "juste réalisme, d'une acceptation des faits sur le terrain". "Assad n'aura jamais la force suffisante pour rétablir son contrôle sur l'ensemble du pays (...) Nous nous focalisons sur le fait de vaincre (l'Etat islamique) et Al Qaïda et d'empêcher que la Syrie serve de repaire terroriste", a-t-il ajouté. S'exprimant à Genève presque au même moment que Nikki Haley, Farah al Atassi, membre du Haut Comité pour les négociations (HCN), principale plateforme de l'opposition syrienne, a estimé que la Maison blanche et le département américain d'Etat envoyaient des messages contradictoires sur la Syrie. En visite à Ankara, le secrétaire d'Etat américain, Rex Tillerson, a déclaré que le statut de Bachar al Assad "sera décidé par le peuple syrien". La France et la Grande-Bretagne ont pour leur part réaffirmé leur position sur le président syrien. "Assad n'est pas et ne peut pas être l'avenir de ce pays", a dit l'ambassadeur français à l'Onu, François Delattre. Ancien ambassadeur des Etats-Unis en Syrie, Robert Ford avait démissionné de ces fonctions en 2014 en raison de ses désaccords avec la politique alors mise en oeuvre par Washington. A ses yeux, la politique syrienne de l'administration Obama a ensuite évolué à partir de fin 2014 pour s'attacher davantage à la lutte contre l'organisation Etat islamique et Al Qaïda "même si elle n'a jamais reconnu que sa priorité avait changé en Syrie". "Les déclarations de l'ambassadrice Haley confirment simplement que l'administration Trump suit cette même voie", a-t-il dit. (Avec Lesley Wroughton à Ankara, Tom Miles à Genève et Steve Holland à Washington; Henri-Pierre André et Bertrand Boucey pour le service français)