Laurent Vinatier, chercheur français détenu depuis juin en Russie, écope de trois ans de prison
INTERNATIONAL - Paris estime que sa condamnation est d’une « extrême sévérité ». La justice russe a condamné, ce lundi 14 octobre, à trois ans de prison le Français Laurent Vinatier, détenu depuis juin. Le chercheur est accusé de ne pas s’être enregistré en tant qu’« agent de l’étranger », alors qu’il collectait des « informations dans le domaine des activités militaires ».
Le tribunal a décidé de « déclarer Laurent Vinatier coupable » et de « le condamner à une peine d’emprisonnement d’une durée de trois ans », a annoncé la juge Natalia Tcheprassova, à l’issue du procès, selon une journaliste de l’AFP présente dans la salle d’audience.
La procureure avait requis plus tôt lundi trois ans et trois mois de prison ferme à l’encontre du Français, « à purger dans une colonie pénitentiaire. » Un réquisitoire jugé « extrêmement sévère » par la défense.
Ses avocats indiquent qu’ils feront appel
Âgé d’une quarantaine d’années, Laurent Vinatier avait reconnu ne pas s’être enregistré sous le label d’« agent de l’étranger », utilisé en Russie contre les voix critiques et qui impose de lourdes obligations administratives, sous peine de sanctions pénales. Il avait assuré ignorer que cette obligation avait été introduite au Code pénal.
« Ma femme est russe, mes amis sont russes. J’ai vécu une vie russe », a-t-il rappelé lundi face aux juges, disant être tombé amoureux de la Russie il y a 20 ans, à l’occasion d’un voyage à Moscou et Saint-Pétersbourg.
Le Français, vêtu d’une chemise bleu claire, est apparu stoïque au moment de l’énonciation du verdict. Il n’a pas eu l’autorisation de s’exprimer après cette sentence devant la presse présente au tribunal. Ses avocats russes, Oleg Bessonov et Alexeï Sinitsine, ont déploré dans la foulée face aux journalistes un « verdict sévère ». « Nous ferons, bien sûr, appel », ont-ils annoncé.
Des informations pouvant être « utilisées contre la sécurité » de la Russie
Les services de sécurité russes (FSB) ont eux affirmé début juillet, dans un communiqué, que l’accusé avait établi de « nombreux contacts » avec des politologues, des économistes et des experts militaires russes, ainsi qu’avec des fonctionnaires. « Au cours d’échanges avec ces personnes, (il) a notamment recueilli des informations militaires et militaro-techniques qui peuvent être utilisées par des services de renseignement étrangers à l’encontre de la sécurité de la Russie », déclarait alors le FSB.
Ces accusations pesant contre lui avaient fait pendant une certaine période redouter une inculpation plus grave, par exemple pour « espionnage », un crime passible de 20 ans de privation de liberté en Russie.
Dans un contexte de relations tendues entre Moscou et Paris
Début septembre, la détention provisoire du Français avait été prolongée de six mois au premier jour de son procès, jusqu’au 21 février. « Je pense à ma femme et à mes enfants », avait-il dit à ses avocats, en russe, à l’occasion d’une suspension d’audience.
Ce chercheur spécialiste de l’espace post-soviétique, qui dit « aime(r) la Russie », d’où sa femme est originaire, travaillait sur le sol russe pour le Centre pour le dialogue humanitaire, une ONG suisse qui fait de la médiation dans des conflits hors des circuits diplomatiques officiels.
Selon des sources interrogées par l’AFP, le Français travaillait depuis des années sur le conflit entre la Russie et l’Ukraine, avant même l’offensive russe de février 2022, dans le cadre de discrets efforts diplomatiques en parallèle à ceux des États. Jusqu’à son arrestation, il effectuait des voyages dans les deux pays.
Cette affaire survient aussi à un moment où les relations entre Moscou et Paris sont très tendues : la Russie est accusée d’une série d’actes de déstabilisation et de désinformation sur le territoire français, tandis que la France se voit reprocher son soutien à l’Ukraine.
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