"L'argent sale" russe nuit à la Grande-Bretagne, annoncent des parlementaires

L'argent russe caché dans les actifs britanniques et blanchi via les institutions financières de la City nuit aux efforts du gouvernement britannique pour adopter une position ferme contre la politique étrangère agressive de Moscou, a estimé lundi une commission parlementaire britannique. /Photo d'archives/REUTERS/Hannah McKay

LONDRES (Reuters) - L'argent russe caché dans les actifs britanniques et blanchi via les institutions financières de la City nuit aux efforts du gouvernement britannique pour adopter une position ferme contre la politique étrangère agressive de Moscou, a estimé lundi une commission parlementaire britannique.

Interrogé sur ce rapport, le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, a dénoncé l'"hystérie russophobe" du Royaume-Uni, accusant Londres de pratiques déloyales et inamicales visant à nuire aux entreprises russes.

Depuis la chute de l'URSS en 1991, la place financière de Londres a connu des investissements massifs réalisés par des hommes d'affaires russes, ce qui a valu à la capitale britannique le surnom de "Londongrad".

Les relations se sont tendues ces derniers mois entre Londres et Moscou, le gouvernement britannique tenant la Russie pour responsable de la tentative d'assassinat qui a visé l'ancien agent double russe Sergueï Skripal et sa fille le 4 mars dernier à Salisbury, dans le sud de l'Angleterre. Moscou dément toute implication dans cette affaire.

Dans un rapport, la commission des Affaires étrangères de la Chambre des communes accuse la Russie de continuer à utiliser la place de Londres pour dissimuler et blanchir de l'argent sale, ce qui entrave les efforts du gouvernement britannique pour faire face à Moscou.

"L'ampleur des dégâts que cet argent sale peut causer aux intérêts britanniques en matière de politique étrangère éclipse les bénéfices des transactions russes à la City", a déclaré le président de la commission, Tom Tugendhat.

"KLEPTOCRATES"

"Il n'y aucune raison pour le Royaume-Uni de fermer les yeux quand les kleptocrates du président (Vladimir) Poutine et ceux qui portent atteinte aux droits de l'homme utilisent de l'argent blanchi à Londres pour corrompre nos amis, affaiblir nos alliances et compromettre la foi en nos institutions", a-t-il ajouté.

Parmi ses recommandations, la commission estime que la Grande-Bretagne devrait travailler avec ses alliés afin de rendre plus difficile pour la Russie l'émission d'obligations souveraines, qui ne sont pas soumises à des sanctions, via des banques qui elles sont sanctionnées.

Plusieurs centaines de milliards de livres seraient blanchis au Royaume-Uni chaque année, estime l'Agence nationale contre le crime (NCA).

"L'utilisation de Londres comme base pour des actifs issus de la corruption d'individus liés au Kremlin est désormais clairement liée à une stratégie plus globale de la Russie, stratégie qui a des conséquences pour notre sécurité nationale", ajoute la commission.

Il est nécessaire de renforcer les sanctions nationales et internationales, préconise le rapport, qui souligne que la "taille des marchés financiers londoniens et leur importance pour les investisseurs russes donnent une emprise considérable au Royaume-Uni sur le Kremlin".

(William James et Andrew MacAskill, avec Denis Pinchuk; Jean Terzian et Guy Kerivel pour le service français)