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L'AfD promet de bousculer le Bundestag

Alternative pour l'Allemagne (AfD) prépare son entrée au Bundestag et la perspective de voir débarquer dans le centre névralgique de la démocratie allemande un parti que le ministre des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, a comparé aux nazis trouble les autres formations politiques. /Photo prise le 11 septembre 2017/REUTERS/Michelle Martin

par Michelle Martin FRANCFORT-SUR-L'ODER, Allemagne (Reuters) - Alternative pour l'Allemagne (AfD) prépare son entrée au Bundestag et la perspective de voir débarquer dans le centre névralgique de la démocratie allemande un parti que le ministre des Affaires étrangères, Sigmar Gabriel, a comparé aux nazis trouble les autres formations politiques. Créé en 2013 pour lutter contre la monnaie unique européenne, l'AfD s'est mué progressivement en parti anti-immigration, profitant de la décision d'Angela Merkel d'ouvrir les frontières aux réfugiés en 2015 pour progresser dans les urnes lors des élections régionales. A moins d'une semaine des élections fédérales du 24 septembre, le parti est crédité d'environ 10% des voix. Il gagne deux points dans la dernière enquête de l'institut Emnid publiée dimanche, à 11%. Son objectif est de devenir la troisième force politique au Parlement, devant les libéraux du FDP, le parti de la gauche radicale Die Linke et les Verts. Dans ce cas de figure, il pourrait même devenir la première force d'opposition au Parlement en cas de reconduction de la grande coalition entre le bloc conservateur d'Angela Merkel (CDU-CSU) et le Parti social-démocrate (SPD). Une telle perspective permettrait à l'AfD de diriger le commission du Budget au Bundestag et d'ouvrir les débats lors des consultations. Le chef de file de l'AfD pour les élections législatives de dimanche, Alexander Gauland, 76 ans, a grimpé dans les sondages pour ses positions dures sur l'immigration, demandant la fermeture des frontières et l'arrêt du regroupement familial pour les migrants. "Nous serons bientôt des étrangers dans notre propre pays", a-t-il asséné lors d'un rassemblement dans la ville de Francfort-sur-l'Oder, à la frontière polonaise. Une fois au Bundestag, Alexander Gauland a déjà prévenu qu'il demanderait l'ouverture d'une enquête parlementaire sur la chancelière. "Nous voulons une enquête sur la politique de Madame Merkel, qui a amené un million de personnes dans notre pays, et qu'elle soit sévèrement sanctionnée pour cela", a-t-il déclaré. DES CANDIDATS EN COSTUME, PAS DES SKINHEADS Georg Pazderski, membre du comité exécutif de l'AfD, promet que son parti utilisera son temps de parole au Parlement pour attirer l'attention sur le coût de la crise migratoire, les troubles dans la zone euro, que l'AfD veut quitter, et les problèmes au sein de l'Union européenne. "Nous pourrons nous exprimer une fois au Parlement", a-t-il dit à Reuters. "Nous serons durs dans l'opposition." D'après lui, les autres partis vont ignorer l'AfD pendant encore un an ou deux, mais finiront par travailler avec la formation, qui sera le premier parti d'extrême droite à entrer au Parlement allemand depuis la chute du IIIe Reich en 1945. Alexander Hensel, qui a étudié le rôle de l'AfD dans les parlements régionaux pour la fondation Otto Brenner, note que les débats s'y sont polarisés depuis l'arrivée des membres du parti antimigrants, à qui certains autres élus refusent de serrer la main. "Le ton adopté et la façon dont les députés se parlent au Parlement sont devenus plus durs, notamment à cause de la rhétorique et des provocations de l'AfD", souligne ce spécialiste. Comme la plupart des partis d'extrême-droite, le vote de l'AfD est toutefois devenu plus socialement acceptable, permettant à la formation d'élargir sa base électorale aux classes moyennes, avance Manfred Güllner, directeur de l'institut de sondage Forsa. "Vous ne votez pas pour des skinheads mais vous pouvez voter pour des professeurs en costume", indique-t-il, en référence aux vestes en tweed d'Alexander Gauland. (Matthias Sobolewski et Andrea Shalal; Arthur Connan pour le service français, édité par Jean-Stéphane Brosse)