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Le parti AfD se droitise avant les élections allemandes

par Michelle Martin COLOGNE, Allemagne (Reuters) - Le parti antimigrants Alternative für Deutschland (AfD), réuni ce week-end en congrès à Cologne, s'est choisi dimanche ses deux chefs de file pour les élections législatives allemandes du 24 septembre, Alexander Gauland, un juriste de 76 ans, et Alice Weidel, une économiste de 38 ans. Le tandem a été désigné par une majorité de délégués quelques jours après le renoncement de Frauke Petry, figure historique du mouvement qui a annoncé mercredi dernier qu'elle ne mènerait pas la campagne de l'AfD. Les quelque 600 délégués du parti avaient par ailleurs rejeté samedi la motion qu'avait présentée Frauke Petry afin de recentrer le parti et de lui permettre de former des alliances avec les formations politiques traditionnelles allemandes. Elle souhaitait notamment que l'AfD rejette "idéologies racistes, antisémites et nationalistes". Les derniers sondages accordent de 8% à 10% des intentions de vote à l'AfD, un score en baisse sensible par rapport à fin 2016 mais supérieur au seuil des 5% requis pour entrer au Bundestag. Alexander Gauland est souvent présenté comme un soutien de Björn Höcke, membre de l'AfD qui a déclenché une vive polémique en janvier dernier en critiquant le mémorial de la Shoah à Berlin et en dénonçant la repentance allemande. A la tribune du congrès de Cologne, Gauland a déclaré que l'AfD voulait "conserver le pays hérité de nos mères et de nos pères", avant d'ajouter: "Nous sommes fiers d'être Allemands." Né en ex-Allemagne de l'Est, passé à l'Ouest, ce juriste de formation a comparé naguère l'arrivée de réfugiés en Allemagne aux barbares qui ont précipité la chute de l'Empire romain. TASSEMENT Moins connue, Alice Weidel, incarne l'aile moins radicale de l'AfD - elle s'est notamment prononcée en faveur de l'exclusion de Höcke. Elle a toutefois accentué récemment ses critiques contre l'islam, accusant le Conseil central des musulmans d'Allemagne de n'avoir "jamais pris de manière crédible ses distances avec la charia de l'âge de pierre et avec le fondamentalisme religieux". Elle a prédit que l'AfD ferait son entrée dans les Parlements régionaux du Schleswig-Holstein et de Rhénanie-du-Nord-Westphalie, lors des scrutins des 7 et 14 mai, avant "de bousculer l'Allemagne" en devenant le "premier véritable parti d'opposition" en septembre au Bundestag. Le politologue Gero Neugebauer estime que la désignation du duo Gauland-Weidel, après le rejet de la motion Petry, suggère une nouvelle droitisation de l'AfD. "Tous deux représentent l'AfD comme un parti qui veut se présenter en parti des classes moyennes, conservateur et économiquement libérale mais qui est dans son essence un parti qui continue de se droitiser", dit-il. Créé en 2013 à l'origine contre la zone euro et les plans de renflouement financier, l'AfD, sous l'impulsion d'une nouvelle direction élue à l'été 2015, a mis de côté les questions liées à la monnaie unique européenne et adopté une ligne très ferme contre l'immigration au moment où la chancelière Angela Merkel décidait d'ouvrir les frontières de l'Allemagne aux réfugiés. La crise des migrants a coïncidé avec son envol électoral, concrétisé par son excellent score aux régionales de septembre dernier dans le land du Mecklembourg-Poméranie occidentale, la région d'origine de la chancelière, où il a pris la deuxième place, devançant pour la première fois de son histoire la CDU, l'Union chrétienne démocrate de Merkel. Mais la cote de l'AfD s'est tassée dans les sondages ces six derniers mois alors que le débat politique tend à se polariser entre les démocrates chrétiens d'Angela Merkel et les sociaux-démocrates de Martin Schulz. Dans la Sarre, lors des régionales du 26 mars, Alternative für Deutschland a obtenu 6% des voix. (avec Hans-Edzard Busemann et Reuters TV; Nicolas Delame et Henri-Pierre André pour le service français)