La réforme fiscale US conduit le FMI à rehausser ses prévisions
PARIS (Reuters) - Le Fonds monétaire international a revu lundi une nouvelle fois en hausse ses prévisions pour l'économie mondiale au vu de l'accélération de la dynamique de croissance à l'oeuvre depuis la mi-2016 mais aussi de l'impact positif attendu à court terme de la réforme fiscale américaine.
Les économistes du Fonds anticipent désormais une croissance mondiale de 3,9% cette année comme en 2019, soit 0,2 point de plus que dans leurs perspectives économiques d'automne publiées en octobre.
Ils ont revu dans le même temps en hausse de 0,1 point, à 3,7%, leurs attentes pour 2017, dont le taux de croissance dépasserait ainsi de 0,5 point sa marque de 2016.
Le FMI souligne que l'accélération en cours, largement autoentretenue, est quasi générale, avec des surprises positives en Europe et en Asie.
Mais il insiste aussi sur l'impact de la réforme fiscale américaine, sous la forme pour l'essentiel d'une poussée des investissements résultant des baisses d'impôts qui profitera aussi aux principaux partenaires commerciaux des Etats-Unis.
Le Fonds précise qu'elle justifie pour moitié, soit 0,1 point, la révision à la hausse de ses prévisions pour l'économie mondiale en 2018 et 2019.
Pour les Etats-Unis, son impact cumulé devrait être de 1,2 point de PIB d'ici à 2020. Mais au vu de la limitation dans le temps de certaines mesures et de la nécessité de s'attaquer au déficit budgétaire créé par cette réforme, une bonne partie des gains seront neutralisés à compter de 2022, prédit le FMI.
PRÉVISIONS QUASI INCHANGÉES POUR LA FRANCE
En attendant, il revoit en hausse de respectivement 0,4 point et 0,6 point ses prévisions pour les Etats-Unis en 2018 et 2019, avec des croissances attendues de 2,7% et 2,5%.
Pour la zone euro, la révision est de +0,3 point pour les deux années, avec des taux de 2,2% puis 2,0%. Elle doit pour beaucoup à l'Allemagne, pour laquelle le Fonds anticipe 2,3% de croissance cette année puis 2,0% en 2019, soit dans les deux cas 0,5 point de plus qu'auparavant.
Les prévisions pour la France restent en revanche quasiment les mêmes que précédemment : +1,9% en 2018 (+0,1 point) et autant l'an prochain (sans changement), après 1,8% en 2017.
Le FMI confirme dans le même temps tabler sur un ralentissement de l'économie britannique (+1,5% en 2018 après +1,7% en 2017) et voit sa croissance stagner à ce niveau en 2019, contre +1,6% attendu auparavant.
Il est en revanche beaucoup plus positif pour le Japon en 2018, avec une prévision de croissance revue en hausse de 0,5 point à 1,2%. Mais pour 2019, elle n'est relevée que de 0,1 point à 0,9%.
S'agissant des pays émergents, l'organisation maintient ses prévisions antérieures (+4,9% en 2018 et +5,0%) en 2019. Mais il revoit légèrement en hausse (+0,1 point) ses anticipations pour la Chine (à +6,6% pour 2018 et +6,4% pour 2019) et plus nettement pour le Brésil (+0,4 point à 1,9% en 2018 et +0,1 point à 2,1% en 2019).
RISQUE DE COMPLAISANCE
Pour Maurice Obstfeld, chef économiste du FMI, l'accélération en cours est une bonne nouvelle "mais les responsables et les dirigeants politiques doivent être conscients que la dynamique actuelle résulte de la conjugaison de plusieurs facteurs qui ne devraient pas se prolonger éternellement".
Il voit "plusieurs raisons (...) pour douter du caractère durable" de la phase actuelle, parmi lesquelles :
- une fois qu'ils auront comblé leur écart de production, les pays développés, en pointe dans l'accélération actuelle, devraient afficher des taux de croissance bien inférieurs aux années d'avant crise. Globalement, le FMI l'estime pour le moment à peine aux deux-tiers de sa prévision de 2,3% pour ces pays en 2018.
- les deux grandes économies qui tirent la croissance actuelle et à court terme, la Chine et les Etats-Unis, sont condamnées à ralentir : la Chine, avec le rééquilibrage de sa croissance, et les Etats-Unis parce l'impact des baisses d'impôts sur une économie si proche du plein emploi générera une moindre croissance à terme.
Dans ce contexte, Maurice Obstfeld estime que le plus grand risque est celui de la complaisance et que les dirigeants mondiaux se doivent de consolider la reprise en renforçant les défenses des économies contre l'instabilité financière et en menant des réformes structurelles.
Le temps est également propice, selon lui, pour agir contre un certain nombre de défis multilatéraux, tout spécialement "de lutter contre les dégâts environnementaux irréversibles, provoqués notamment par le changement climatique".
(Yann Le Guernigou, édité par Marc Joanny)