Publicité

La fin des centrales à charbon renvoyée à plus tard

La centrale thermique fioul et charbon de Cordemais, Loire-Atlantique. Le gouvernement français souhaite étaler dans le temps la fin programmée des centrales à charbon pour tenir compte de diverses contraintes sociales et juridiques. /Photo d'archives/REUTERS/Stephane Mahe

PARIS (Reuters) - Le gouvernement français souhaite étaler dans le temps la fin programmée des centrales à charbon pour tenir compte de diverses contraintes sociales et juridiques, a déclaré dans la nuit de jeudi à vendredi le secrétaire d'Etat au Budget à l'Assemblée. L'instauration par la loi de finances rectificative de fin 2016 d'un prix plancher du carbone pour la production électrique au charbon, afin d'anticiper une future réforme du marché européen du CO2, ne paraît donc plus désormais d'actualité. Le chef de l'Etat, François Hollande, l'avait pourtant annoncée solennellement à la conférence environnementale d'avril dernier et cette promesse avait été confirmée en juillet par la ministre de l'Environnement, Ségolène Royal. L'idée était d'instaurer un prix plancher d'environ 30 euros la tonne de CO2 émis par les centrales au charbon, condamnant à brève échéance les cinq dernières unités de ce type en France. Lors du débat sur le projet de loi de finances 2017, le secrétaire d'Etat au Budget, Christian Eckert, a reconnu que cela mettait en jeu "plus d'un millier d'emplois" et suscitait une vive émotion dans les bassins concernés. "Je vois que cette affaire provoque un émoi considérable dans le pays, au moins dans quelques régions (...) et il y a des mouvements sociaux importants face à l'inquiétude que provoquent ces dispositions", a-t-il déclaré. La CGT a mobilisé jeudi ses salariés du secteur de l'électricité thermique contre cette "taxe carbone", dont elle exige l'abandon, et annoncé un "meeting national de lutte" à la centrale de Gardanne (Bouches-du-Rhône), le 27 octobre. Christian Eckert a aussi invoqué des contraintes juridiques "importantes" au niveau européen, ainsi que des problèmes constitutionnels et d'indemnisation, indépendamment des questions sociales et d'aménagement du territoire. "Je crois qu'il serait judicieux d'avoir un étalement dans le temps (de ces) dispositions", a-t-il ajouté. UNE ÉCHÉANCE REPORTÉE À 2023 ? Leur élaboration interviendrait en outre en plein débat sur les risques de rupture de charge électrique cet hiver, en raison notamment de l'arrêt de réacteurs nucléaires. Dans un tel contexte "il n'est peut-être pas opportun de le faire tout de suite", avait dit auparavant à Reuters une source gouvernementale. Christian Eckert a fait sa mise au point alors que deux députés socialistes, Serge Bardy et Jean-Paul Chanteguet, avaient déposé un amendement à la loi de finances supprimant l'exonération de taxe intérieure sur la consommation (TICC), dont bénéficient les centrales au charbon. C'est un des deux scénarios dont le gouvernement avait chargé une mission d'experts d'évaluer les implications juridiques, économiques et sociales, le second consistant à moduler la fiscalité des installations de production électrique en fonction de leurs émissions de CO2. Cet amendement n'a finalement pas été défendu par ses auteurs dans l'hémicycle. "Il y a une chance que le gouvernement demande (son) retrait", avait-t-on dit à Reuters de source gouvernementale. Christian Eckert a fait valoir que la programmation pluriannuelle de l'énergie, prévue par la loi de transition énergétique d'août 2015 et censée être publiée la semaine prochaine, prévoyait "de toute façon à terme, au plus tard en 2023, de mettre fin à ces centrales" au charbon. "On peut même aller plus vite", a-t-il ajouté. "Nous avons engagé des discussions, d'ailleurs, pour envisager avec les entreprises en question des échéances plus courtes." Ségolène Royal aura aussi l'occasion de parler de ce dossier dimanche lors de l'émission politique à laquelle elle est invitée sur France 3, dit-on de source gouvernementale. (Emmanuel Jarry)