France: La croissance pénalisée par une consommation poussive au 1er trimestre

PARIS (Reuters) - La croissance de l'économie française a marqué le pas en début d'année, le tassement de la consommation des ménages éclipsant la franche progression de l'investissement, notamment des entreprises.

Dans sa première estimation publiée vendredi, l'Insee fait état d'une hausse de 0,3% du produit intérieur brut au premier trimestre, un niveau conforme à la prévision de sa dernière note de conjoncture publiée mi-mars ainsi qu'aux anticipations de la Banque de France.

Ce chiffre s'avère en revanche inférieur aux attentes des 35 économistes interrogés par Reuters, qui tablaient en moyenne sur une croissance de 0,4% sur la période.

L'Insee a dans le même temps révisé en hausse de 0,1 point la croissance du produit intérieur brut (PIB) du quatrième trimestre 2016, à 0,5%, sans que cela ne modifie le chiffre de la croissance en moyenne sur l'année, maintenu à 1,1%.

"La composition de cette croissance fait que ce chiffre de 0,3% est moyennement robuste, même si dans l'absolu c'est un chiffre relativement correct", résume Hélène Baudchon, économiste chez BNP Paribas.

CORRECTIONS EN VUE

En ce début d'année, la demande intérieure finale a contribué positivement au PIB, à hauteur de 0,4 point - principalement sous l'effet d'une nouvelle accélération de l'investissement, qui a compensé le net ralentissement de la consommation des ménages.

Alors que le déficit commercial avait atteint un niveau record en janvier sous l'effet d'une forte baisse des exportations d'Airbus et était resté élevé en février, le commerce extérieur a sans surprise pesé lourdement sur la croissance.

L'impact négatif du commerce extérieur en début d'année (-0,7 point après +0,2 point au quatrième trimestre) a été compensé par la contribution des variations des stocks des entreprises (+0,6 point après -0,2), mais cette composante très volatile risque de connaître une correction dans les prochains mois.

Dans le détail, "une bonne part des éléments de faiblesse du chiffre de croissance du premier trimestre sont de nature ponctuelle", souligne Hélène Baudchon.

C'est notamment le cas pour le moteur traditionnel de la croissance française, les dépenses de consommation des ménages. Leur net ralentissement (+0,1% après +0,6% en fin d'année dernière) a principalement été alimenté par le repli des dépenses en énergie (−3,8% après +3,7%) en lien avec les températures particulièrement douces de février et mars après un automne plutôt frais.

Autre élément ponctuel, mais à l'impact positif, la perspective de l'expiration le 14 avril dernier du dispositif de suramortissement fiscal des investissements productifs des entreprises, qui a probablement contribué à alimenter le net rebond de l'investissement des entreprises (+1,3% après +0,9%).

Mais selon Axelle Lacan, économiste de l'institut COE-Rexecode, l'amélioration de l'investissement des entreprises observée au premier trimestre dépasse le champ des seuls bien d'équipements, les principaux concernés par cette mesure.

Son impact favorable n'est donc pas forcément voué à s'inverser au trimestre prochain comme cela avait été le cas début 2016, alors que la prolongation du dispositif n'avait été annoncée qu'en février.

ACCÉLÉRATION AU DEUXIÈME TRIMESTRE ?

Parallèlement la croissance de l'investissement des ménages est restée soutenue (+0,9%, comme le trimestre précédent), reflétant la reprise de la construction et de l'immobilier qui se confirme.

Le nombre de mises en chantiers de logements cumulé sur douze mois a ainsi atteint fin mars un plus haut depuis près de quatre ans et demi, selon des données publiées vendredi par le ministère du Logement.

"Le deuxième trimestre devrait encore se solder par une croissance aux alentours de 0,3%, entre les variables qui devraient rebondir - la consommation des ménages et les exportations - et les variables qui devraient subir un contrecoup dans un sens défavorable, comme les variations de stocks", estime Hélène Baudchon.

Axelle Lacan s'attend elle aussi à ce que l'économie française progresse à un rythme comparable le trimestre prochain, après un début d'année marqué par "une croissance assez molle qui reflète bien l'état de l'économie française".

"Une dynamique interne très forte de reprise fait toujours défaut à l'économie française, qui reste pénalisée par des contraintes structurelles", comme par exemple son déficit de compétitivité, estime-t-elle.

"Il va certainement finir par s'améliorer du fait de l'effet des mesures mises en place pour soutenir l'offre mais ça prend du temps, donc pour l'instant, le commerce extérieur continue de nous pénaliser".

Tullia Bucco, économiste d'Unicredit, et François Cabau, économiste de Barclays, sont en revanche plus optimistes et tablent dans des notes publiées vendredi sur une accélération de la croissance au deuxième trimestre, mettant notamment en avant la bonne orientation des enquêtes de conjoncture.

(Myriam Rivet, édité par Sophie Louet)