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La coalition de Dilma Rousseff sur le point d'éclater

par Anthony Boadle BRASILIA (Reuters) - Le premier parti politique brésilien devrait décider ce mardi de quitter la coalition dirigée par Dilma Rousseff, ont déclaré plusieurs de ses dirigeants, accroissant encore la probabilité d'une destitution de la présidente. La direction nationale du Parti du mouvement démocratique brésilien (PMDB) se réunit dans la journée pour se prononcer sur son maintien au gouvernement, au sein duquel il détient sept portefeuilles en plus de la vice-présidence. Une rupture formelle semble désormais inévitable, avec pour conséquence d'accroître encore l'isolement de Dilma Rousseff tout en laissant les parlementaires du PMDB libres de voter éventuellement sa destitution. Des responsables du parti estiment que 70 à 80% des 119 membres de la direction du PMDB devraient se prononcer pour la fin de l'alliance avec Rousseff et son Parti des travailleurs (PT). L'un d'eux a déclaré à Reuters que 75 d'entre eux s'étaient déjà engagés à approuver la rupture. Un vote sur la destitution de la présidente pourrait avoir lieu début mai au Congrès. Au cas où Dilma Rousseff serait suspendue de ses fonctions dans l'attente d'une décision du Sénat, c'est son vice-président, Michel Temer, chef de file du PMDB qui assurerait l'intérim. Lundi déjà, le ministre PMDB du Tourisme, Henrique Eduardo Alves, a annoncé sa démission. "Le dialogue, j'ai le regret de le dire, est arrivé à son terme", a-t-il écrit dans sa lettre de démission à Dilma Rousseff. Des conseillers de Temer ont déclaré que le vice-président était prêt à assumer les fonctions de chef de l'Etat et à tenter de sortir le pays de la récession. Plusieurs médias brésiliens ont rapporté pendant le week-end que l'entourage de Temer était en train d'élaborer un programme de travail pour ses premières semaines de présidence. NOUVELLE DEMANDE DE DESTITUTION La Bourse de Sao Paulo a gagné plus de 2% lundi et le réal s'est apprécié face au dollar, bénéficiant des informations sur un possible départ de Dilma Rousseff. Cette dernière est accusée d'avoir maquillé les comptes publics pour faciliter sa réélection en 2014, des faits qui s'ajoutent à la crise politique liée à l'enquête sur un système de corruption à grande échelle impliquant plusieurs des principales entreprises du pays, à commencer par le géant pétrolier Petrobras. L'ordre brésilien des avocats (OAB) a réclamé lundi l'ouverture d'une nouvelle procédure de destitution à l'encontre de Dilma Rousseff, qu'il accuse aussi d'obstruction à la justice et d'avoir accordé des exemptions fiscales à la Fédération internationale de football (Fifa) lors de la Coupe du monde 2014. Des partisans de la présidente ont tenté lundi d'empêcher physiquement l'OAB de déposer sa requête devant la chambre basse du Parlement brésilien aux cris de "Não passaram" (ils ne passeront pas), cri de ralliement traditionnel de la gauche. Parmi les éléments présentés par l'OAB, la question de l'obstruction à la marche de la justice est peut-être la plus sensible pour la présidente. L'accusation est fondée sur les aveux du sénateur Delcidio Amaral, ancien allié de la présidente. L'OAB reproche en outre à Dilma Rousseff d'avoir fait entrer dans son gouvernement son prédécesseur, Luiz Inacio Lula da Silva, afin de le préserver des poursuites judiciaires. L'organisation, qui représente un million d'avocats brésiliens, accuse également la présidente d'avoir attenté aux intérêts du pays en dispensant la Fifa d'impôts lors de la Coupe du monde 2014. Cette nouvelle requête vient s'ajouter à la dizaine d'autres que le président de la chambre basse, Eduardo Cunha, doit examiner. Eduardo Cunha, adversaire farouche de Dilma Rousseff, est lui même visé dans le scandale Petrobras. (Nicolas Delame et Marc Angrand pour le service français)