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L'aéroport d'Hodeïda presque aux mains des forces yéménites

par Mohammed Ghobari et Mohamed Mokashef

ADEN (Reuters) - Les forces yéménites soutenues par la coalition formée par l'Arabie saoudite, qui ont lancé il y a deux jours la plus vaste offensive du conflit en direction d'Hodeïda, ont pris vendredi le contrôle de deux entrées de son aéroport, ont annoncé à Reuters un habitant et deux représentants de l'armée yéménite.

Les avions de la coalition ont pilonné les zones côtières au sud-est de la ville tenue par les rebelles chiites. Ils ont aussi ciblé les tireurs d'élite Houthis placés dans les écoles et d'autres bâtiments du quartier de Manzar, ont dit des habitants de ce quartier qui jouxte l'aéroport d'Hodeïda.

"Il y a eu des bombardements terrifiants depuis le début de la matinée, quand ils ont frappé les positions des Houthis près de l'aéroport", a déclaré un poissonnier, Ammar Ahmed. "Nous vivons dans une terreur que nous n'avions jamais connue auparavant", a-t-il ajouté.

Des dizaines d'habitants ont fui le quartier de Manzar pour rejoindre le centre de la ville. Les autres rues d'Hodeïda étaient vides, les habitants se barricadant chez eux malgré la fête de l'Aïd el Fitr, qui marque la fin du ramadan.

Selon des sources médicales, 23 civils ont été blessés lors des combats dans le quartier de Manzar. Un hôpital du centre d'Hodeïda a fait des appels au don de sang, a annoncé un habitant.

D'après le dernier représentant de l'ONG CARE International encore présent à Hodeïda, "la situation n'a jamais été aussi effrayante. Nous pouvons entendre les combats se rapprocher. La situation se dégrade vraiment".

La coalition sunnite à laquelle participent aussi les Emirats arabes unis a également bombardé la route de Sanaa pour empêcher le mouvement chiite pro-iranien, qui tient la capitale et les zones les plus peuplées du pays, d'envoyer des renforts à Hodeïda.

"PRESSION"

"Nous travaillons à sécuriser l'aéroport. Nous lancerons bientôt la prochaine phase des opérations afin de faire pression sur les Houthis sur plusieurs fronts", a dit la coalition arabe dans un communiqué transmis à Reuters.

"La priorité est d'éviter des victimes chez les civils, de maintenir l'arrivée d'aide humanitaire et d'autoriser l'Onu à faire pression sur les Houthis pour qu'ils évacuent la ville", a-t-elle ajouté.

Six cent mille personnes vivent à Hodeïda et dans ses environs. Les quatre cinquièmes des biens de première nécessité importés au Yémen transitent par son port et les Nations unies craignent une aggravation de la crise humanitaire. Selon l'organisation, 22 millions de Yéménites ont besoin d'une aide d'urgence et 8,4 millions sont déjà menacés par la famine. Ce chiffre pourrait passer à 18 millions à la fin de l'année si la situation ne s'améliore pas.

Le Conseil de sécurité, qui s'est réuni jeudi à huis clos pendant deux heures pour évoquer l'offensive, a appelé "toutes les parties à respecter leurs obligations en vertu du droit humanitaire international", a annoncé l'ambassadeur russe auprès des Nations unies.

Vassili Nebenzia, qui préside le Conseil de l'Onu au mois de juin, a exprimé "la profonde inquiétude" des 15 membres du Conseil, qui ont réitéré leur appel pour que les ports d'Hodeïda et de Salif restent ouverts.

L'Arabie saoudite et les Emirats arabes unis, qui ont promis de faire le nécessaire pour éviter une aggravation de la situation humanitaire, assurent qu'elle s'améliorera une fois que les rebelles auront été chassés d'Hodeïda.

Mohammed Ali al Houthi, chef de file du mouvement, a exhorté jeudi soir ses partisans à faire échec aux "instruments des Etats-Unis et d'Israël". "La côte yéménite a toujours été une cible stratégique pour les envahisseurs et affronter l'agression est un devoir national face au danger de l'occupation étrangère", a-t-il déclaré.

(Avec Tom Miles à Genève, Jean-Philippe Lefief et Jean Terzian pour le service français, édité par Henri-Pierre André)