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L’état d’urgence et le temps de l’histoire

Contrairement aux «lois scélérates» de la IIIe et à l’état d’urgence mis en place lors de la guerre d’Algérie, les mesures antiterroristes de l’après-13 Novembre s’intègrent davantage aux politiques quotidiennes de sécurité mises en place depuis des années.

Enseigner l’histoire aujourd’hui, c’est faire face à l’inévitable question des antécédents et des analogies. Cette année accablante que l’on est pressé de voir s’achever ressemble-t-elle à quelque chose de déjà vu ? Les expériences du passé peuvent-elles nous réconforter, doivent-elles nous inquiéter ?

Paris a connu un premier vent de panique, une «fièvre de la dynamite», lors des attentats anarchistes des années 1890. Difficile de ne pas y penser quand le hasard du calendrier met au programme de mes étudiants la glaçante déclaration d’Emile Henry : ce jeune anarchiste qui a jeté une bombe meurtrière dans un café des beaux quartiers y théorise la violence dirigée contre «des consommateurs paisibles qui écoutent de la musique». Le parallèle est aussi tentant que trompeur - et même indécent s’il s’agit de comparer, hors de tout contexte politique et social, anarchistes et jihadistes !

En revanche, il est plus pertinent de s’intéresser aux logiques naissantes de l’antiterrorisme et à ces «lois scélérates» qui rognent les libertés publiques. Encore ne sont-elles pas appliquées sans nuance : si la IIIe République manie la guillotine et le bagne, elle sait aussi acquitter pour désamorcer l’engrenage de la répression et de la violence. Disons surtout que la croissance économique, de premières lois sociales protectrices (la réglementation des accidents du travail) et de nouvelles possibilités d’expression politique et syndicale combinent leurs effets pour détourner de la «propagande par le fait» ceux qui avaient pu y être sensibles.

Plus proche de nous, la guerre d’Algérie constitue l’autre miroir dans lequel se diffractent nos angoisses présentes. Davantage encore, il faut résister aux séductions faciles de l’analogie, (...)

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