«L’Oiseau vert», envol de bon augure

Mise en scène par Laurent Pelly, la fable philosophique et grinçante de l’auteur italien Carlo Gozzi, rival de Goldoni, révèle sa féerie loufoque.

Qu’on le veuille ou non, en dépit de certaines bonnes volontés tentant d’installer des passerelles, un (petit) monde continue de séparer théâtre privé et théâtre public. Notamment parce que le premier est régi par des considérations éminemment économiques où, critère ultime, prévaut le taux de remplissage. Classé monument historique, le théâtre parisien de la Porte Saint-Martin n’échappe pas à la règle. D’autant qu’il dispose chaque soir de 1 800 fauteuils à commercialiser ; un ordre de grandeur qui condamne implicitement l’établissement à miser sur des noms bankable (Michel Bouquet/Michel Fau, ou Vincent Dedienne/Clotilde Hesme/Laure Calamy ces derniers mois), quand bien même son jeune directeur, Jean Robert-Charrier, assure vouloir maintenir une exigence artistique certaine.

Marâtre. Aussi, en parfait contre-exemple du diktat people, s’est posé là depuis la mi-mai un curieux Oiseau vert dont, pour être franc, on se demande bien comment, malgré ses qualités intrinsèques, il pourrait parvenir à faire le plein : oublié de beaucoup, l’auteur (et comte) Carlo Gozzi (1720-1806), n’appartient pas au cénacle de la dramaturgie, pas plus que le metteur en scène, Laurent Pelly - en dépit du fait qu’il a codirigé le Théâtre national de Toulouse. Et, pour couronner le tout, aucun des douze comédiens impliqués ne possède une envergure telle qu’elle lui permettrait de tailler la bavette un matin sur Inter chez Augustin Trapenard.

Créé début 2015 et ayant déjà pas mal tourné en province, cet Oiseau vert persifleur n’en possède pas moins une grâce indéniable, au risque (assumé ?) que la forme, tirée au cordeau, finisse par menacer le fond, pour qui se hasarderait à rêvasser au gré des péripéties parsemant cette fable philosophique à tiroirs, née en 1765 à Venise.

Véritable imbroglio familial, l’intrigue s’ancre dans la cité imaginaire (...)

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