Quelle est l’influence des lobbies des énergies fossiles sur l'UE ?

Les représentants des sept plus grandes compagnies pétrolières privées mondiales, ainsi qu’un réseau de plus de 50 organisations, ont participé à plus de 1 000 réunions avec des responsables européens entre 2019 et 2024, selon un nouveau rapport publié par Transparency International.

Les deux tiers de ces réunions ont porté sur le pacte vert, la stratégie de l’UE pour atteindre son objectif de neutralité climatique à l’horizon 2050, indique le rapport.

"Un sujet qui revient sans cesse est la promotion de l’utilisation de l’hydrogène, mais aussi des systèmes de captage et de stockage du carbone", détaille Raphaël Kergueno, responsable plaidoyer chez Transparency International.

"Ces systèmes sont aujourd’hui assez controversés, mais ils ont trouvé leur place dans les nouvelles priorités de la Commission", ajoute-t-il.

Le budget total consacré au lobbying de ces supermajors pétrolières, à savoir Shell, Total, Eni, Equinor, ExxonMobil, Chevron et BP, et de leur réseau s’est élevé à près de 64 millions d’euros, ce qui les place parmi les organisations les mieux dotées à Bruxelles, estime le responsable plaidoyer.

COP 28

Transparency International a également constaté un chevauchement des lobbyistes des énergies fossiles à Bruxelles avec les délégués présents à la COP 28, la Conférence des Nations Unies sur le changement climatique qui s’est tenue à Dubaï l’année dernière.

"Nous avons vu à la COP 28 que c’était la COP avec la plus forte présence de lobbyistes des énergies fossiles ou d’organisations liées à l’industrie des énergies fossiles dans l’histoire de la COP", explique Raphaël Kergueno.

Il rappelle que les parties qui ont participé aux discussions ont finalement décidé de ne pas opter pour une "sortie totale" du pétrole, du gaz et du charbon."Ce pipeline de puissance s’étend du niveau européen au niveau mondial", ajoute-t-il.

Ouvrir la porte aux entreprises des énergies fossiles

Près de 900 réunions ont eu lieu entre les représentants de la commission d’Ursula von der Leyen et des lobbyistes des énergies fossiles au cours de son mandat, selon un autre rapport publié par Fossil Free Politics, une campagne coordonnée par Friends of the Earth Europe, Corporate Europe Observatory, Food and Water Europe et Greenpeace.

"L’industrie des énergies fossiles a eu beaucoup de succès pour affaiblir, retarder et bloquer les actions climatiques nécessaires", déclare Kim Claes, membre de Fossil Free Politics, à Euronews.

Ce deuxième rapport affirme que l'invasion à grande échelle de l'Ukraine par la Russie a facilité l’accès des compagnies pétrolières à la Commission afin de la conseiller sur la réponse de l’Europe à la crise énergétique.

"Il y a eu le programme REPowerEU et ils ont ouvert la porte à l’industrie des combustibles fossiles pour leur demander leur avis", estime Kim Claes. "Ils leur ont donné libre accès pour rédiger un nouveau plan pour l’UE afin de répondre aux menaces liées à l’invasion russe et pour rendre l’UE moins dépendante du gaz russe."

La question du lobbying semble au moins être sur le radar de l’UE. Dans sa lettre au commissaire qui sera chargé des questions de transparence, von der Leyen a appelé à renforcer le système de transparence de la Commission européenne.

Elle propose de soumettre tous les managers au registre de transparence : une base de données répertoriant les organisations qui tentent d’influencer les décisions des institutions européennes.