L'étrange traitement de la langue maternelle dans le cerveau des polyglottes
Plus la langue écoutée ou lue nous est familière, plus le réseau du langage est activé... Sauf pour la langue maternelle, suggère une étude. Chez des polyglottes maîtrisant au moins cinq langues, la langue maternelle provoquait au contraire une réponse du réseau du langage aussi faible qu'une langue inconnue.
Vous pouvez avoir une maîtrise parfaite de plusieurs langues, mais votre cerveau traitera toujours différemment votre langue maternelle, concluent de nouveaux travaux. Bien qu'ils ne soient pas encore publiés (pré-print), ces résultats soulèvent d'ores et déjà les questionnements des experts. "On ne sait pas expliquer cette différence de traitement de la langue maternelle, c'est fascinant et surprenant", commente Benjamin Morillon, chercheur Inserm à l'Institut de Neurosciences des Systèmes d'Aix-Marseille Universités.
Des hyperpolyglottes, parlant jusqu'à 54 langues
"Nous voulions comprendre comment plusieurs langues pouvaient coexister dans un même cerveau" et l'intensité de l'activation cérébrale qu'elles provoquent, explique la chercheuse Evelina Fedorenko qui a dirigé ces travaux. Pour le savoir, exit les bilingues : pour étudier le traitement cérébral des langues apprises, il faut pouvoir en comparer plusieurs entre elles, en dehors de la langue maternelle. "La langue maternelle définit les fonctions cognitives dédiées au langage. Les autres langues se basent sur la langue maternelle et les réseaux déjà en place pour émerger", explique Benjamin Morillon. Dans leur étude, les chercheurs incluent donc 25 polyglottes, maîtrisant tous de 5… à 54 langues ! Au-delà des 10 langues, on parle d'hyperpolyglottes.
Comparer l'activation cérébrale en fonction de la maîtrise de la langue
"Les précédentes études analysaient des bilingues, et montraient plus ou moins d'activation pour la langue 1 que pour la langue 2. Dans tous les cas on pouvait l'expliquer : soit la maîtrise d'une langue entraîne une meilleure efficacité du réseau et donc une réponse plus faible, soit au contraire plus on maîtrise une langue et plus on active le réseau avec un traitement profond", résume Benjamin Morillon. "Ici c'est une vraie bonne idée d'avoir choisi des multilingues, pour comparer le traitement des différentes langues non maternelles." Dans une machine à IRM fonctionnelle permettant de [...]
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