Publicité

Kirill Serebrennikov, féroce critique du régime russe, secoue Cannes avec son nouveau film

Le cinéaste russe Kirill Serebrennikov - BFMTV
Le cinéaste russe Kirill Serebrennikov - BFMTV

Avec La Femme de Tchaïkovski, qui a ouvert la compétition cannoise mercredi, l'enfant terrible du cinéma russe Kirill Serebrennikov sort avec brio de l'ombre de l'histoire la femme du compositeur de génie, épousée pour cacher son homosexualité.

Un demi-siècle après le biopic soviétique d'Igor Talankine (1969) et La Symphonie pathétique de Ken Russell (1971), le film explore pendant 2h23 la vie et les souffrances d'Antonina Milioukova (incarnée par une découverte, Alena Mikhailova).

Pas un biopic

D'une facture bien plus classique et moins foutraque que La Fièvre de Petrov, en compétition l'an dernier, mais sans retrouver l'entrain de Leto (2018), sur le rock soviétique, le film est porté par un véritable souffle romanesque et une réalisation brillante.

Pour son réalisateur, ce film n'est pas un biopic, mais il s'inspire de documents réels: "Toutes les répliques sont inspirées de lettres ayant réellement existé", confie le réalisateur à BFMTV. Serebrennikov planche depuis plusieurs années sur ce film, qui aborde la vie intime de Tchaïkovski, qui reste inconnue des Russes.

Si l'homosexualité du compositeur était connue depuis longtemps, des passages de lettres de Tchaïkovski, publiés sans censure pour la première fois en 2018, dévoilaient ses chagrins d'amour ou ses désirs pour des hommes.

"Les personnes normales n'aiment pas la guerre"

Critique du régime russe, Kirill Serebrennikov a également évoqué sur notre antenne son opposition à la guerre en Ukraine: "Je ne peux pas dire que j'apporte mon soutien à la guerre. Je suis contre toute forme de guerre. Je ne connais personne qui soutienne la guerre. Les personnes normales n'aiment pas la guerre."

876450610001_6306301401112

Mis en cause à Cannes par certains Ukrainiens qui affirment que "toute sa carrière a été financée par l'argent du gouvernement russe", Serebrennikov précise que son film a été financé par des entreprises indépendantes russes ainsi que par des fonds européens:

"On me pose la question du rôle d'Abramovitch [un oligarque russe] qui détient un des fonds qui a financé mon film. Abramovitch a beaucoup aidé les projets d'art contemporain. Ce n'est pas de l'argent qui vient du gouvernement. Il m'a aidé personnellement."

Soutien aux personnes LGBT+

Sa montée des marches ce mercredi a aussi suscité de vives critiques de la part de la part de représentants de cinéastes ukrainiens, qui ont appelé à "effacer" "tout ce qui est russe".

Connu pour ses créations iconoclastes, son soutien aux personnes LGBT+ et sa critique indirecte du régime de Poutine, Kirill Serebrennikov, qui ouvrira en juillet le Festival d'Avignon, est pour la troisième fois en compétition à Cannes.

Il n'avait, jusqu'ici, jamais pu se rendre au Festival de Cannes pour ses films en compétition, la justice russe l'ayant interdit de sortir du territoire, dans le cadre d'une affaire de détournement de fonds.

Sans être un opposant ou un dissident, il a toujours publiquement pris position contre le rétrécissement des libertés en Russie ou les guerres menées par le Kremlin à l'étranger, et a participé à des manifestations. "C'est difficile d'être un symbole", a-t-il confié lors de sa rencontre avec BFMTV.

Article original publié sur BFMTV.com