Kamala Harris en Une du « New Yorker » : qui est Malika Favre, l’artiste française qui signe cette couverture

En mai, Malika Favre a été la présidente du jury d’illustration pour le Festival D&AD, récompensant les meilleurs artistes visuels.
Instagram (@malikafavre) En mai, Malika Favre a été la présidente du jury d’illustration pour le Festival D&AD, récompensant les meilleurs artistes visuels.

ART - Pas mal non ? C’est français. La fameuse réplique du film La Classe américaine s’applique parfaitement à Malika Favre, illustratrice née en région parisienne et travaillant pour de nombreux magazines américains dont le New Yorker. Elle signe à nouveau la couverture de l’hebdomadaire pour le numéro qui doit sortir le 7 octobre, consacré à Kamala Harris. Une édition pas comme les autres puisque la publication y annonce son soutien officiel à la candidate démocrate pour la présidentielle.

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Malika Favre est passée des magasins aux magazines. Après avoir travaillé pour Le Bon Marché ou Sephora, l’artiste au style mélangeant pop art et art optique séduit les plus grands hebdomadaires ou mensuels anglo-saxons, de Vogue au New York Times, en passant par le Sunday Times ou Vanity Fair. La modernité de ses illustrations minimalistes plaît particulièrement au New Yorker, avec qui elle entretient une relation qui dure depuis huit ans.

Cette fois, il s’agit d’un portrait de la démocrate sur un fond bleu nuit avec les traits de l’ancienne vice-présidente dessinés en noir. Seuls son visage et des mèches de cheveux sont éclairés d’un reflet bleu marine, tandis que sa boucle d’oreille en forme d’étoile est d’un blanc rappelant la couleur du titre.

Dans une autre publication, accompagnée d’un long message, Malika Favre est également revenue sur la fructueuse collaboration qu’elle entretient avec le magazine culturel américain depuis 2016.

Les 16 Unes de « The New Yorker » illustrées par Malika Favre.
Instagram (@malikafavre) Les 16 Unes de « The New Yorker » illustrées par Malika Favre.

Elle y remercie Françoise Mouly, directrice artistique du New Yorker depuis 1993, qui l’a contactée pour réaliser sa première Une, mais souligne également la difficulté artistique de trouver de la justesse dans ses dessins.

« Pour ces 16 couvertures que vous voyez ici, il y a des dizaines et des dizaines de concepts qui n’ont jamais vu la lumière du jour. Certaines idées ne sont tout simplement pas assez fortes, d’autres vont probablement trop loin et enfin il y a ceux qui sont trop en avance ou trop en retard pour leur temps. »

De la prépa scientifique aux illustrations du Kama Sutra

Fille d’une peintre qui l’a initiée au dessin, Malika Favre a bien failli ne jamais devenir une artiste. Après le lycée, la Française s’est orientée vers une classe préparatoire scientifique, mais après quatre petits mois, elle a compris qu’elle ne souhaitait plus devenir ingénieure quantique.

Après un passage par l’École nationale supérieure des arts appliqués et des métiers d’art (ENSAAMA) de Paris, puis le Collège universitaire de l’Institut d’art et de design de Surrey (SIAD), elle intègre à Londres l’agence Airside, qui a remporté de nombreuses récompenses.

« Visuellement, c’était un endroit tellement riche, foisonnant de créativité et d’influences du monde entier. C’est là-bas que mon style a réellement mûri et pris forme. Cette ville m’aura appris beaucoup de choses, dont l’audace », dit-elle de la capitale britannique dans un entretien au média Beware en 2023.

Malika Favre y cultive son style et sa représentation des femmes, son sujet de prédilection. Elle peut les dessiner « les yeux fermés » comme elle le confiait au média The Great Discontent, malgré des illustrations considérées comme « pas assez nobles » pendant son cursus scolaire. « Certains professeurs me détestaient parce que je faisais des romans très graphiques et que je mettais en scène des femmes sexy dans mes carnets de croquis », affirme-t-elle dans la même interview.

Elle réalise aussi la couverture et un alphabet inspirés du Kama Sutra de Vātsyāyana pour la maison d’édition britannique Penguin Books en 2012. Une autre manière de rendre hommage au corps de la femme. « Le corps de la femme est magnifique et j’apprécie particulièrement dessiner des figures féminines fortes. Ce que j’apprécie, c’est de regarder les choses différemment de mon voisin. Offrir une perspective différente sur ce que les gens ne voient pas forcément », appuie-t-elle dans un portrait du magazine Madame Figaro qui la qualifie déjà comme « l’illustratrice française qui a conquis la presse américaine » en 2019.

Deux ans plus tôt, son dessin « Operating Theatre » (salle d’opération) en Une du New Yorker du 3 avril 2017 avait donné naissance au mouvement #IlookLikeASurgeon. L’illustration représentant quatre femmes chirurgiennes était devenue le symbole de la féminisation du métier comme l’explique un article du Monde.

Avec cette nouvelle représentation de Kamala Harris en pleine période présidentielle, Malika Favre étoffe donc un peu plus sa galerie de « femmes fortes ».

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