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Juncker invite Paris à ne plus se défausser sur l'euro

par Noah Barkin BERLIN (Reuters) - Les difficultés économiques de la France sont le résultat de ses mauvais choix politiques et Paris doit cesser d'imputer ses problèmes à la vigueur de l'euro, a déclaré Jean-Claude Juncker, candidat du Parti populaire européen (PPE) à la présidence de la Commission européenne, dans une interview accordée à Reuters. "Je ne pense pas que la France soit l'homme malade de l'Europe mais je déconseille vraiment de chercher ailleurs que chez soi les causes de ce qui résulte en partie de ses propres erreurs", souligne l'ancien Premier ministre luxembourgeois qui fut aussi le président de l'Eurogroupe de 2005 à janvier 2013. La force de l'euro, reconnaît-il, a créé des problèmes pour un certain nombre d'Etats membres de l'Union économique et monétaire. Mais, insiste-t-il, le niveau de la monnaie unique est le même pour tous. "Si la France traverse une période plus difficile que pour d'autres pays, les raisons doivent être trouvées en France, et non dans les taux de changes", dit-il. La question de l'euro fort a rejailli ces derniers jours dans le débat public à la suite du plaidoyer de Manuel Valls en faveur d'une politique monétaire plus adaptée "car, a dit le Premier ministre français, le niveau de l'euro est trop élevé". "Il faut un changement majeur qui fasse de notre monnaie davantage un outil au service de la croissance et de l'emploi, au service des peuples", a-t-il ajouté samedi dernier lors d'un rassemblement de jeunes militants européens de gauche. Ses propos ont été critiqués par le gouvernement allemand. Berlin a rappelé que la question du niveau de l'euro relevait de la Banque centrale européenne (BCE), dont le président, Mario Draghi, a averti jeudi qu'il ne fallait pas menacer l'indépendance de l'institut européen d'émission. La monnaie unique européenne a frôlé jeudi le seuil de 1,40 dollar, un niveau sans précédent depuis deux ans et demi, avant de refluer après la conférence de presse de Draghi. JUNCKER POUR DES "CHAMPIONS EUROPÉENS" Jean-Claude Juncker, chef de file du PPE aux élections européennes étalées du 22 au 25 mai, rejoint en revanche les positions françaises sur l'idée de favoriser l'émergence de "champions industriels" européens à l'image d'Airbus, qu'il qualifie de "modèle de réussite" à imiter. Il estime ainsi que les gouvernements nationaux ont le droit d'intervenir dans des projets d'accords industriels affectant leurs intérêts. "Lorsque l'occasion se présente d'élargir un champion (national), nous devrions essayer de lancer des champions européens", dit-il. "Les gouvernements ne devraient pas décider à la place des entreprises, mais les gouvernements ont des intérêts et le droit d'être impliqués dans de telles décisions." Le gouvernement français tente depuis plusieurs semaines d'influer sur le sort du groupe d'énergie et de transports Alstom, dont les activités dans le secteur de l'énergie sont convoitées par l'américain General Electric. Paris, qui a favorisé une contre-offre de l'allemand Siemens, juge qu'un rapprochement entre le groupe français et le groupe allemand pourrait faire naître deux champions européens, l'un dans le domaine de l'énergie, l'autre dans les transports ferroviaires. (Henri-Pierre André pour le service français)