Judith Godrèche interpelle le Sénat avec des demandes concrètes pour la « famille incestueuse » du cinéma

L’actrice s’est exprimée lors d’une audition sur les jeunes victimes de violences sexuelles. Elle demande le retrait de Dominique Boutonnat, le président du CNC.

SÉNAT - « Cette petite société du cinéma, n’est que le reflet de notre société ». Judith Godrèche avait rendez-vous ce jeudi 29 février dans le cadre solennel du Palais du Luxembourg. Au Sénat, devant les parlementaires de la délégation au droit des femmes, l’actrice s’est exprimée lors d’une audition d’1h30, retransmise sur Public Sénat. Comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article, Judith Godrèche a formulé des demandes particulièrement concrètes, et brisé le silence entourant les jeunes victimes de violences sexuelles.

« Je me permets de vous demander de constituer une commission d’enquête contre les violences sexuelles et sexistes dans le milieu du cinéma, de demander et pardonnez-moi j’imagine, crois savoir que ce n’est pas forcément en votre pouvoir mais tant pis ce sera dit, le retrait de Dominique Boutonnat, dont le procès va bientôt avoir lieu, je crois », a demandé l’actrice, qui a porté plainte début février contre les réalisateurs Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour « viol sur mineur de 15 ans »

« Il y a des charges de violences sexuelles contre lui », a poursuivi Judith Godrèche au Sénat, avant d’appuyer sur le responsable : « Dominique Boutonnat, qui est le président du CNC (Centre national du cinéma et de l’image animée, NDLR), une institution dans laquelle se rendent les producteurs tout en rigolant parce qu’ils se disent “C’est drôle, je vais aller faire une formation contre les violences sexuelles à l’intérieur d’un immeuble, d’une institution dont le président est lui-même accusé de violences sexuelles”. C’est quoi cette blague ? »

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Dominique Boutonnat a été mis en cause dans une affaire, pas encore jugée, d’agression sexuelle présumée sur son filleul de 21 ans, des accusations qu’il conteste. Il a été reconduit dans ses fonctions malgré cette affaire, au grand dam des associations féministes.

4 500 témoignages reçus

« Cette société, cette petite société du cinéma, n’est que le reflet de notre société », a encore affirmé l’actrice lors de son audition. « Cette famille incestueuse du cinéma n’est que le reflet de toutes ces familles et de tous ces témoignages que je reçois chaque jour : 4 500 aujourd’hui. 4 500 témoignages de personnes qui, par ailleurs, avaient ancré leurs espoirs dans la présence du juge Durand à la tête de la Ciivise. »

Le juge Édouard Durand est l’ancien dirigeant de la Ciivise, la commission indépendante sur l’inceste et les violences sexuelles faites aux enfants, actuellement en pleine crise.

Judith Godrèche a également demandé d’« imposer un référent neutre sur les tournages avec un mineur, un référent qui n’est pas payé par la production, qui est formé », et « qu’un enfant ne soit jamais laissé seul sur un tournage », avec « un système de contrôle plus efficace ». Elle souhaiterait aussi « un coach d’intimité pour les scènes qui impliquent » des scènes à caractère sexuel.

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« L’idée n’est pas d’être voyeur et de la faire venir pour témoigner, mais de réfléchir à ce qu’il est possible de faire pour protéger » les enfants des violences sexuelles, avait souligné avant l’audition la sénatrice centriste Dominique Vérien, qui espérait qu’elle pourrait « dénoncer un système, et ce qu’il se passe avec des mineurs livrés seuls à des réalisateurs qui en font ce qu’ils veulent ».

Depuis qu’elle a porté plainte contre Benoît Jacquot et Jacques Doillon pour des violences sexuelles lorsqu’elle était adolescente, l’actrice est devenue la figure de proue du mouvement de dénonciation de ces violences dans le cinéma.

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