Juan Branco : ce que l'on sait sur les accusations de violences sexuelles contre l'avocat
L'avocat, célèbre notamment pour s'être engagé aux côtés des Gilets Jaunes en 2018, fait l'objet d'une mise en examen pour viol depuis novembre 2021.
De lourdes accusations portées par quatre femmes différentes. Ce jeudi 12 décembre, Libération publie sur son site internet une longue enquête au sujet de l'avocat Juan Branco, actuellement visé par au moins une plainte pour viol, à la suite de laquelle il a été mis en examen en novembre 2021.
Révélé médiatiquement à l'époque des Gilets Jaunes et se présentant depuis comme un farouche opposant au pouvoir macroniste, l'avocat âgé de 35 ans a par ailleurs été condamné, en novembre dernier, à 9 mois de suspension du droit d’exercer pour violation du secret de l’instruction dans cette même affaire. Ayant fait appel, il a toutefois conservé ce droit.
Une plainte datant de 2021
Les témoignages relayés ce jeudi par Libération constituent donc à n'en pas douter un important rebondissement dans le feuilleton juridique autour de Juan Branco, d'autant que l'un des témoignages concerne directement les faits pour lesquels l'avocat est poursuivi depuis novembre 2021.
L'une des quatre victimes présumées citées par Libération est en effet la jeune femme qui accuse Juan Branco de l'avoir violée. Cette dernière affirme être entrée en contact avec lui sur Instagram au moment de la publication de Crépuscule (un livre écrit par l'avocat en 2018 et revenant sur l'accession au pouvoir d'Emmanuel Macron), pour le "féliciter spontanément" de la parution cet ouvrage.
Il lui propose "du whisky et des cachets de Lamaline"
A la suite de cet échange, ce dernier lui aurait proposé une rencontre, dont la date n'est pas donnée clairement par Libération. "J’étais si naïve, j’ai cru à une discussion intellectuelle, je n’ai pas vu la drague, affirme la jeune femme. J’y suis allée sans aucune arrière-pensée, sans aucune méfiance."
Après un premier rendez-vous, Juan Branco lui en aurait proposé un deuxième dans la foulée, à l'issue duquel il aurait invité à la jeune femme à passer chez lui. Une fois dans l'appartement du centre de Paris, il lui aurait proposé de consommer avec lui "du whisky et des cachets de Lamaline, un antalgique à base d’opium, de Doliprane et de caféine".
"J’ai seulement réussi à lui demander de mettre un préservatif"
"Intimidée" selon Libération, la jeune femme aurait accepté et l'avocat aurait ensuite tenté d'abuser d'elle. "J’ai d’abord esquivé ses baisers, gênée. Puis il a commencé à vriller, à devenir de plus en plus insistant, décrit-elle, citée par le quotidien. Il s’est jeté sur moi, m’a léché l’oreille, m’a proposé du sexe oral, réclamé un jeu érotique avec les pieds", décrit-elle, rappelant avoir dit non à chaque avance.
"On n’est jamais préparée à vivre un viol, poursuit la jeune femme. C’est terrifiant de voir quelqu’un que vous avez idolâtré pendant des années se transformer en prédateur sexuel face à vous." Décrivant un contexte angoissant, la jeune femme affirme être restée dans l'appartement par "peur qu’il (la) rattrape et qu’il soit dix fois plus violent". Elle aurait ensuite cédé devant l'insistance de l'avocat. "J’ai seulement réussi à lui demander de mettre un préservatif, affirme-t-elle. Inconsciemment, je savais qu’une grossesse non désirée ou une maladie serait une double peine."
"Je lui ai demandé d’arrêter, il a continué à me toucher les fesses"
Toujours dans les colonnes de Libération, deux autres jeunes femmes accusent Juan Branco de les avoir agressées sexuellement en 2017. La première, qui était âgée de 23 ans à l'époque, affirme avoir participé à la campagne électorale de l'avocat (qui s'était présenté aux législatives 2017 en Seine-Saint-Denis, sous les couleurs de La France Insoumise) en qualité de vidéaste.
Selon cette témoin, Juan Branco l'aurait agressée à l'occasion d'une réunion informelle dans le petit appartement de l'avocat. Alors que les deux personnes étaient assises sur le lit du jeune homme, ce dernier aurait, selon la jeune femme, "mis sa main dans (sa) culotte". "Je lui ai demandé d’arrêter, il a continué à me toucher les fesses, je l’ai repoussé physiquement", poursuit la victime présumée.
"Ce n’est pas normal de me toucher comme il m’a touchée"
L'agression ne serait ensuite pas allé plus loin, la jeune femme ayant quitté précipitamment l'appartement, au grand dam de Juan Branco. Quelques années plus tard, la jeune femme aurait été entendue par la police au sujet de cet épisode, déclenchant la colère de l'avocat, qui l'aurait ensuite publiquement dénigrée.
Juan Branco mis en cause par une amie de sa sœur
La troisième jeune femme connaissait Juan Branco depuis au moins 2007, mais affirme pour sa part qu'elle n'a jamais été proche de lui. Cette témoin explique en revanche avoir entretenu des relations amicales avec la sœur de l'avocat, ce qui l'a conduite à le croiser plusieurs fois à l'occasion de soirées arrosées.
C'est après l'une d'entre elles, le 9 novembre 2017, que l'agression se serait produite. Ce soir-là, Juan Branco aurait proposé à la jeune femme de poursuivre la soirée dans l'appartement familial situé dans le VIe arrondissement de Paris. Connaissant bien les lieux, elle aurait accepté la proposition.
"Ce qui m’a rassurée, c’est que sa mère était là", précise la jeune femme, qui dit s'être installée "à la fenêtre pour fumer une cigarette, penchée sur le parapet", alors que Juan Branco s'était dirigé vers une autre pièce du logement. "La suite se passe hyper soudainement, relate la témoin. J’entends du bruit, il surgit dans mon dos, baisse mon pantalon, me pénètre en me tenant fermement par la taille. J’ai ressenti un énorme choc, de la terreur, mon corps s’est pétrifié."
Une quatrième agression dénoncée par une ancienne amante
Libération donne enfin la parole à une quatrième jeune femme qui affirme avoir été agressée sexuellement par Juan Branco. Les deux personnes se seraient fréquentées pendant quelques mois, entre 2018 et 2019, "comme des amants et sans rien se devoir". Dans ce cadre, l'avocat aurait eu à plusieurs reprises des comportements qualifiés de "toxiques" par cette témoin.
"Il avait notamment un rapport très ambivalent aux préservatifs : c’est le seul mec, dans ma vie, qui a réussi à m’imposer de ne pas en mettre, raconte-t-elle à Libération. Lors de deux rapports, il a insisté lourdement jusqu’à ce que je cède. Une autre fois, il l’a enlevé pendant l’acte sans mon accord."
Un trou noir inexpliqué
Au-delà de ces faits, la jeune femme accuse surtout l'avocat de l'avoir droguée à son insu. Les faits seraient survenus lors d'une soirée où les deux amants s'étaient retrouvés dans un club parisien. "Je prends une autre bière. Puis on part danser ailleurs, retrace la témoin. Là, il me propose un cocktail à base de tequila. Je refuse car je n’aime pas l’alcool fort mais je termine les trois dernières gorgées du sien. Mon dernier souvenir de la soirée : il est 5 heures du matin et je veux partir."
La jeune femme aurait ensuite vécu un trou noir, avant de se réveiller plusieurs heures plus tard, nue, dans le lit de Juan Branco. "J’ai rassemblé mes affaires, explique-t-elle. Il m’a juste dit : 'Si j’étais vous, je prendrais une pilule du lendemain' et j’ai compris qu’on avait eu un rapport non protégé à mon insu." Après avoir quitté les lieux, elle aurait ensuite réalisé qu'elle présentait "les symptômes d’une descente de drogue" et pas ceux "d’une gueule de bois".
"J’ai pensé qu’un mec avait mis un truc dans le verre"
Si elle n'a jamais porté plainte pour ces faits présumés, elle a donc décidé de sortir du silence en racontant son histoire à Libération. "Je veux témoigner pour protéger d’autres femmes, mais pas voir mon nom dans ce dossier", explique la jeune femme, qui a choisi de garder l'anonymat par peur de représailles de Juan Branco. Selon Libération, les trois autres femmes concernées, qui ont toutes parlé à la police, ont en effet dû faire face à la publication en ligne par Juan Branco "de photos dénudées, d’extraits de leurs procès-verbaux d’audition, le tout enrobé de propos insultants".