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Journée mondiale sans tabac : le confinement, ce piège à fumeur

Si 27% des fumeurs ont déclaré avoir augmenté leur consommation de tabac pendant le confinement, 19% ont déclaré l'avoir diminuée et 55% ont déclaré qu'elle était resté stable.

Si ce dimanche tombe la journée mondiale sans tabac, la consommation de cigarettes a elle bien augmenté ces derniers mois. Consommation accrue, rechute, angoisse et stress : témoignages de fumeurs au temps du corona.

C’est l’un des nombreux effets néfastes du confinement. Au début du mois de mai, Santé publique France révélait que près d’un tiers (27%) des fumeurs avaient augmenté leur consommation de tabac pendant les premières semaines du confinement et que les fumeurs quotidiens avaient en moyenne augmenté leur consommation de 5 cigarettes par jour. C’est donc tout logiquement que les ventes de tabac dans l’Hexagone ont augmenté de près de 25%, comme l’indique la Société nationale d’exploitation industrielle des tabacs et allumettes (SEITA), qui tient tout de même à rappeler que la fermeture des frontières n’est pas étrangère à cette forte augmentation. Pour preuve, les hausses les plus importantes ont été constatées dans les régions frontalières. Au total, le confinement aurait engendré 1,9 million d'acheteurs de tabac supplémentaires en France.

L’ennui et le manque d’activité sont la première cause

Contactée par Yahoo Actualités, Viêt Nguyen-Thanh, responsable de l’unité addictions à la direction de la prévention et de la promotion de la santé à Santé publique France, donne plusieurs raisons à cette hausse soudaine de la consommation de tabac durant cette période de confinement : “Le premier motif cité par les 3/4 des fumeurs qui ont augmenté leur consommation est l’ennui et donc le manque d’activité”.

Un motif confirmé par Sandrine, auxiliaire de vie scolaire âgée de 50 ans, qui avait considérablement diminué sa consommation de tabac depuis plusieurs mois grâce à la cigarette électronique, ce qu’elle n’a pas réussi à prolonger pendant le confinement. “Le fait d’être complètement enfermée ne m’a pas aidée. J’ai tenu les 10 premiers jours avec ma cigarette électronique mais j’ai vite laissé tomber. Je n’ai pas vraiment essayé de lutter pour ne pas reprendre parce qu’au fond, vu la situation, je savais que j’allais reprendre.” En revanche, elle est persuadée qu’avec la reprise du travail, il sera bien plus simple de diminuer sa consommation de cigarettes : “Quand j’aurai repris mon rythme normal, c’est à dire quand j’aurai repris le boulot, je compte reprendre ma cigarette électronique pour diminuer à nouveau.”

Angoisse et stress

Selon l’enquête de Santé publique France, le deuxième motif le plus cité par les fumeurs ayant augmenté leur consommation est l’angoisse et le stress. “Les consommations de tabac ont tendance à augmenter avec les niveaux avérés d’anxiété et de dépression. Les addictions et la santé mentale sont très souvent liées, que ça soit pour l’alcool ou le tabac”, explique Viêt Nguyen-Thanh.

Christophe, ancien chauffeur poids-lourd âgé de 52 ans, confirme cette tendance, lui qui avait arrêté de fumer quelques jours avant le confinement en raison d’une opération chirurgicale : “Je suis quelqu’un de nature assez pessimiste et lors de l’annonce du confinement ça a joué sur mon moral. J’ai tout de suite craint l’avenir à cause de cette maladie et j’ai eu envie de reprendre. Sûrement pour trouver un refuge avec cet épisode très angoissant.” Gros fumeur depuis de nombreuses années, Christophe n’est pas pour autant pessimiste lorsqu’on lui demande s’il pense arrêter de fumer à l’avenir. “Je suis passé de presque deux paquets par jours à zéro cigarette du jour au lendemain. Je me dis donc que si j’ai réussi une fois à le faire, même si ça n’a duré que 16 jours, pourquoi pas y parvenir une deuxième fois. L’envie est là.”

Plus facile d’arrêter à la reprise du boulot ?

Le troisième motif évoqué par la responsable de l’unité addictions à la direction de la prévention et de la promotion de la santé de Santé publique France est le plaisir. “Le plaisir de pouvoir se réserver un moment de pause dans la journée pour ceux pour qui les journées n’avaient ni vraiment de début ni vraiment de fin”.

Pour Théo, entrepreneur de 26 ans, c’est ce plaisir de fumer mais aussi le fait d’être loin de ses proches qui l’a fait reprendre la cigarette : “Je n’étais pas ‘surveillé socialement’. Il n’y avait pas ma famille ou mes amis qui savaient que j’avais arrêté depuis 8 mois pour me dire quoi que ce soit. Fumer a toujours été mon petit plaisir et je n’avais pas envie de m’en priver. J’ai quand même réussi à arrêter de fumer pendant une semaine de confinement, mais maintenant ça fait 6 semaines que je fume constamment.” Ce n’est pas pour autant que le jeune entrepreneur qui n’a toujours pas repris son activité pense continuer à fumer dans les semaines à venir, bien au contraire. “Je suis hyper motivé pour arrêter à nouveau et je pense que quand j’aurais repris mon rythme de vie normal avec le boulot, ça sera bien plus simple de ne pas fumer que pendant le confinement.”

Ces différents témoignages laissent penser que la consommation de tabac aura tendance à diminuer chez les fumeurs dans les semaines à venir, quand les gens auront retrouvé une “vie normale”. “Nous avons continué nos enquêtes pour les semaines suivantes du confinement et même jusqu’au déconfinement, donc nous saurons dans les prochaines semaines si les gens ont réussi à diminuer en reprenant le travail”, précise Viêt Nguyen-Thanh. Attention tout de même aux retombées de cette crise sanitaire qui pourraient prouver le contraire : “À l’inverse, il y a aussi des facteurs socio-économiques qui entrent en jeu. Par exemple, si le taux de chômage augmente, on sait que c’est un indicateur qui a un impact sur l’augmentation de la consommation de tabac”, conclut-elle.

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