Journée des droits des femmes: appel à la grève pour les "premières de corvées" de la crise

Manifestation organisée par le
Manifestation organisée par le

"Sans les femmes, le monde s'arrête": associations et militantes appellent lundi à une "grève féministe" et des manifestations dans toute la France à l'occasion du 8 mars pour dénoncer les injustices subies par les femmes, accentuées par la crise sanitaire.

Pour la Journée internationale des droits des femmes, date symbolique officialisée en 1977 par l'ONU, 37 organisations syndicales, féministes et politiques ont lancé un mouvement unitaire pour "mettre fin aux discriminations et aux violences sexistes et sexuelles" subies par celles qu'elles ont rebaptisées les "premières de corvées".

Les femmes "au front"

"Le 8 mars, nous serons en grève avec les femmes du monde entier pour refuser toutes et tous ensemble de payer le prix de la crise avec notre travail, notre salaire, notre corps", ont dit lundi ces organisations dont la FSU, la CGT, Solidaires, Osez le féminisme, Les Effronté-e-s, le Planning familial, l'Unef ou le Collectif national pour les droits des femmes.

Plusieurs rassemblements seront organisés dans toute la France, notamment à Paris où une manifestation ira de Port-Royal à la place de la République en passant par la Sorbonne pour "dénoncer la précarité étudiante", l'Ile de la Cité pour "interpeller la justice" ou la place du Châtelet pour sensibiliser au statut des intermittentes du spectacle, ont-elles précisé. Un rassemblement parisien, "festif et féministe", est également prévu dimanche place de la République.

Persistance des écarts de salaire, mise en lumière des métiers à prédominance féminine, conséquences psychologiques du confinement, hausse des violences intrafamiliales: ce 8 mars vient ponctuer la première année d'une crise sanitaire mondiale aux effets sans précédents.

"L'épidémie a mis en lumière que les femmes étaient au front, en première ligne à travers différentes professions et aussi à la maison", estime Mireille Stivala de la CGT Santé et action sociale.

"Revaloriser les salaires des métiers à prédominance féminine"

Dans un rare communiqué commun, l'ensemble des grandes organisations syndicales, hormis la CFTC, a réclamé mercredi l'ouverture de négociations pour "revaloriser les salaires des métiers à prédominance féminine" et "corriger" l'index de l'égalité professionnelle pour "permettre de supprimer effectivement les écarts de rémunération".

Infirmières, aides-soignantes, aides à domicile, caissières, aides ménagères, garde d'enfants... Si les femmes représentent 70% des personnes en première ligne pendant la crise sanitaire, elles ne sont que 24% parmi les décideurs chargés d'en organiser les réponses, rappelle un sondage commandé par l'association Focus 30, citant des chiffres de l'ONG Care International. En outre, selon cette enquête, plus d'une femme sur cinq (22%) a "souffert de stress émotionnel ou de problèmes psychologiques" depuis la crise, contre 14% des hommes.

Les femmes ont "tendance à davantage se saisir de l'opportunité du télétravail, comme ça elles n'ont pas à prendre quelqu'un pour garder les enfants après l'école, ça fait une économie. Mais cela peut poser un risque pour l'évaluation professionnelle ou les perspectives de promotion", explique à l'AFP Marie Mercat-Bruns, professeure de droit à Sciences Po Paris et chercheuse sur les questions de discrimination et de genre.

"Grève féministe" contre le "travail invisible"

Pour "marquer le coup", les militantes appellent les femmes à s'arrêter lundi à 15h40, heure théorique où elles cessent d'être rémunérées compte tenu de l'écart de salaires avec les hommes (environ 25%).

"La grève féministe c'est la grève du travail, dans le sens salarié, mais c'est aussi l'arrêt du travail invisible à la maison, pour dénoncer la charge mentale et les inégalités dans la répartition des tâches", souligne Murielle Guilbert de Solidaires.

La pandémie n'a en tout cas pas empêché ces derniers mois les luttes féministes de réclamer l'individualisation de l'allocation adulte handicapé (AAH), aujourd'hui corrélée aux revenus du conjoint, la PMA pour toutes ou l'allongement du délai légal pour avorter. Le mouvement #Metoo a aussi pris un nouvel essor avec notamment des témoignages accablants sous le mot-dièse #Metooinceste, poussant le gouvernement à engager un processus pour changer la loi, ou encore ceux d'étudiantes avec #sciencesporcs.

"La société commence à tendre l'oreille", estime Claire Charlès des Effronté-e-s, "c'est pas le moment de relâcher la pression".

Article original publié sur BFMTV.com