JO de Paris 2024 : « Il sera difficile pour Emmanuel Macron de tirer profit de la séquence »
POLITIQUE - Un état d’esprit un peu particulier flotte en France depuis le 26 juillet. Plus léger, plus festif, plus joyeux que d’habitude. Les Jeux Olympiques, et son lot de médailles, de prouesses et d’exploits sportifs donnent lieu partout à des scènes de liesse populaire. Après des mois de « JO bashing », où les pires scénarios ont été envisagés, sur le plan de la sécurité, de la fluidité des transports ou de l’accès aux sites olympiques, la surprise est grande.
Manifestement, Emmanuel Macron entend surfer sur cette réussite. Le chef de l’État a en effet multiplié les apparitions auprès des athlètes, enchaîné les tweets de félicitations et fait plusieurs allers-retours entre la capitale et son lieu de villégiature, à Brégançon, pour s’assurer un minimum de visibilité. Suffisant pour redorer son blason après la séquence de la dissolution et des législatives, qui n’ont pas été bonnes pour la majorité présidentielle ?
« En général, ces moments de ferveur profitent au pouvoir en place », expose l’historien Jean Garrigues, auteur de Jours heureux : quand les Français rêvaient ensemble. La dernière fois que la France a connu pareille communion, c’était en 1998 avec la Coupe de monde de football. « La liesse collective et l’unité patriotique avaient alors beaucoup profité à ceux qui étaient au pouvoir. Jacques Chirac et Lionel Jospin, son Premier ministre, avaient enregistré un regain de popularité spectaculaire », poursuit l’universitaire.
Crise politique et dissolution
Difficile de dire si le schéma est amené à se reproduire pour ces JO de Paris 2024. D’autant que la configuration est cette fois différente. « Avec la dissolution et la crise politique naissante dont beaucoup le jugent responsable, il sera beaucoup plus difficile pour Emmanuel Macron de tirer profit de la séquence », juge Jean Garrigues. Avant d’ajouter qu’au regard du « rejet dont il fait l’objet depuis quelques mois », le Président part de loin pour se faire aimer des Français. La preuve étant cette réforme des retraites imposée au forceps contre l’avis de 70 % des Français, et les deux élections successives perdues au début de l’été (européennes et législatives).
« Macron aime aller au contact »
« La situation politique tout sauf claire ne prédispose pas à un éventuel phénomène de rassemblement », complète l’historien, qui rappelle qu’on a « un Président sans avenir, sans horizon politique, qui devra partir quoiqu’il arrive en 2027 ». En 1998, Jacques Chirac n’en était qu’à son premier mandat ; il s’est d’ailleurs représenté en 2002, et l’a emporté.
Quant aux images où Emmanuel Macron apparaît au plus près des athlètes après les matchs, Jean Garrigues estime que cela correspond aux cadres de la Vème République. « C’est lié à la personnalité de Macron, qui aime aller au contact, mais on est en plein dans cette hyperprésidence que Nicolas Sarkozy avait définie à l’époque, dans la continuité du statut du président sous la Vème République ». Le professeur émérite met toutefois en garde le chef de l’État : « Trop de présence peut nuire à sa popularité ».
« Macron est hors-sol »
Un avis que semble partager l’athlète Hugo Hay, qui va participer samedi à sa première finale olympique sur 5 000 mètres. Le jeune coureur affirme dans un entretien à l’Humanité : « Emmanuel Macron est hors-sol, et j’ai l’impression que son entourage le laisse sur son piédestal. Je voudrais lui dire que ce ne sont pas ses Jeux, mais ceux des athlètes ».
Dans la guerre ouverte entre le Président et son Premier ministre démissionnaire, lui-même très actif pendant les Jeux (Gabriel Attal ne s’est offert qu’un week-end de répit en Corse la semaine dernière), Jean Garrigues ouvre les pronostics : « L’effet JO pourrait profiter de manière plus sensible à Gabriel Attal qu’à Emmanuel Macron ».
« Les problèmes n’ont pas disparu »
Considérant que « le sport est un vecteur de rassemblement patriotique, fraternel et universel », au-delà des appartenances et des étiquettes habituelles, Jean Garrigues craint toutefois que sitôt les Jeux terminés, le cours normal des choses reprenne. « Les problèmes de la société n’ont pas disparu », pointe-t-il. Emmanuel Macron doit nommer un Premier ministre, former un gouvernement, trouver une majorité, faire passer des lois. Et alors là, la parenthèse enchantée sera définitivement refermée.
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