JO de Paris 2024 : en Algérie, le village d’Imane Khelif s’enflamme pour la médaille d’or de la boxeuse
PARIS 2024 - Le village pauvre et rural de la championne olympique algérienne de boxe Imane Khelif, au coeur malgré elle d’une controverse sur le genre, a laissé exploser sa joie après la victoire de la jeune femme ce vendredi 9 août aux JO de Paris.
« C’est la victoire de l’Algérie », a déclaré aux médias son père, Omar Khelif, qui a regardé le combat diffusé sur un écran géant dans le stade avec le reste du village à Biban Mesbah, comme vous pouvez le voir dans notre vidéo en tête d’article.
Suivant la tradition du baroud, des habitants ont tiré en l’air en l’honneur de la boxeuse de 25 ans, victorieuse de la Chinoise Yang Liu en moins de 66 kg, et alors que des enfants arboraient son nom sur le front. À Biban Mesbah, localité d’environ 6 000 habitants, située à 10 km de Tiaret, les youyous se mêlant au nom de la boxeuse et au célèbre slogan « one two three, viva l’Algérie ».
Des centaines de bénévoles étaient venus dès le matin participer aux préparatifs du grand soir. Malgré des températures caniculaires (plus de 46 degrés), les hommes ont mené une vaste opération de nettoyage pendant que des dizaines de femmes s’affairaient à cuisiner un couscous géant.
« Imane Khelif a honoré l’Algérie »
« Nous nous sommes mis d’accord pour donner un nouveau visage au village et lui insuffler une nouvelle vie, avec la victoire d’Imane Khelif », a confié à l’AFP son cousin Mounir Khelif, 36 ans. « Nous nous sommes entraidées, certaines ont apporté du couscous, d’autres de l’huile et des légumes, tandis que celles qui ne pouvaient pas aider avec des provisions, ont contribué à la préparation », a raconté Amina Saadi, 52 ans, mère de six enfants. « Nous sommes tous unis derrière Imane Khelif qui a honoré l’Algérie, c’est le moins que l’on puisse lui offrir », a-t-elle dit.
Sur les réseaux sociaux, la boxeuse a été victime d’une campagne de haine, empreinte de racisme et alimentée par plusieurs dirigeants populistes comme Donald Trump ou Georgia Meloni, la présentant comme un « homme combattant des femmes ». « Je suis une femme forte avec des pouvoirs spéciaux. Depuis le ring, j’ai envoyé un message à ceux qui étaient contre moi », a-t-elle répondu vendredi soir après son sacre.
La controverse a éclaté à Paris quand son adversaire en 8e de finale, Angela Carini, a abandonné dès les premières secondes du match. La Première ministre italienne a alors dénoncé « un combat qui n’était pas sur un pied d’égalité ». En pleine campagne présidentielle américaine, Donald Trump s’est ensuite emparé du sujet, et continuait de le faire en meeting dans les heures qui ont suivi le combat victorieux de la boxeuse.
Tensions avec la Fédération internationale de boxe
La polémique a pour origine son exclusion en demi-finale des Mondiaux 2023 à New Delhi car, selon la Fédération internationale de boxe (IBA), exclue du mouvement olympique il y a un an pour une multitude de controverses, elle avait échoué à un test destiné à établir son genre. Soutenue par le CIO, Khelif disputait ses deuxièmes Jeux après Tokyo en 2021, où elle s’était classée cinquième des -60 kg, et elle avait participé à de nombreux tournois féminins depuis. Les Algériens de tous bords ont affiché leur solidarité, irrités que son père soit contraint de montrer son acte de naissance aux journalistes pour prouver qu’elle était née fille.
Imane a raconté que son père, au début, a eu du mal à accepter sa pratique de la boxe. « Je suis issue d’une famille conservatrice. La boxe n’était pas un sport très pratiqué par les femmes, surtout en Algérie. C’était difficile », a-t-elle déclaré en juin à la télévision Canal Algérie.
Outre les préjugés qu’elle a combattus, la jeune femme a dû trouver les moyens de financer ses tickets de bus pour aller de son village à son club de la Protection civile à Tiaret, puis vers la capitale Alger, au point qu’adolescente, elle vendait de la ferraille et sa mère du couscous préparé à la maison. Et à la fin, elle repart avec l’or et le sourire.
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