Jeux paralympiques : pourquoi Valentina Petrillo sera la première athlète transgenre à y participer
PARALYMPIQUES - Elle espère être « la première de beaucoup d’autres ». À 50 ans, la sprinteuse italienne Valentina Petrillo est la première sportive transgenre à participer aux Jeux paralympiques. Elle foulera le 2 septembre la piste violette du Stade de France pour le 1er tour du 400 m catégorie T12 (pour les sportifs ayant une déficience visuelle).
L’athlète, qui avait manqué « d’un souffle » sa qualification pour les Jeux paralympiques de Tokyo en 2021, souffre depuis l’adolescence de la maladie de Stargardt, une dégénérescence maculaire génétique synonyme de perte progressive de la vision. Mais elle est consciente que, plus que son chrono, c’est son parcours qui marquera les esprits. Trois ans après l’haltérophile néo-zélandaise Laurel Hubbard, devenue à Tokyo la première sportive transgenre à participer aux JO, Valentina Petrillo se prépare à marquer l’histoire – mais aussi à recevoir des critiques, menaces ou à subir du cyberharcèlement, dans le sillage de plusieurs polémiques autour du genre durant les olympiades.
Entre athlétisme et para-athlétisme, des différences de règlement
Aux Jeux olympiques et paralympiques, l’autorisation de participation pour les personnes transgenres est laissée à l’appréciation de chaque fédération sportive. Dans ce domaine, le règlement de l’athlétisme est inflexible : en 2023, la fédération internationale World Athletics a décidé d’exclure de la catégorie féminine les athlètes trans qui auraient transitionné après avoir connu une puberté masculine (qui débute en général entre 10 et 12 ans). Dans la pratique, cela bannit l’ensemble des femmes transgenres des compétitions féminines.
Une décision qui ne concerne pas les athlètes handicapées. En effet, du côté de la World Para Athletics, on se base sur deux données : l’état civil de l’athlète, qui fait foi pour déterminer son genre, ainsi que son taux de testostérone, qui doit être conforme à la réglementation des épreuves féminines (en dessous de dix nanomoles par litre de sang pendant au moins douze mois avant la première compétition). Puisque Valentina Petrillo remplit ces deux critères, elle peut tout à fait concourir aux épreuves de para-athlétisme.
Deux médailles mondiales
En 2017, Valentina Petrillo a fait son « coming out » trans auprès de sa femme avant de débuter sa transition et de changer d’état civil en 2023. Après s’être adonnée au cécifoot, un football à cinq pour personnes malvoyantes, et avoir représenté l’Italie dans les tournois les plus importants, elle a fini par renouer avec ses premiers amours, le 200 m, « découvert grâce au mythe Pietro Mennea », ancien détenteur du record du monde et champion olympique 1980, et le 400 m.
Dans les années 1990 déjà, Petrillo n’était pas parvenue à se qualifier pour les Jeux paralympiques 1996, mais cet échec avait été beaucoup moins douloureux. « Quand j’étais un homme, je n’étais pas moi-même, insiste-t-elle, je courais toujours avec le frein à main, je n’étais pas une personne heureuse, pas aussi heureuse que je le suis maintenant, même si j’ai quelques années de plus. »
En 2023, elle ramène des Championnats du monde de para-athlétisme de Paris deux médailles de bronze (200 et 400 m). Cette ingénieure en informatique, qui s’entraîne une heure et demie à trois heures par jour, « sauf le dimanche », aborde les Jeux paralympiques avec des objectifs sportifs ambitieux. « Je veux améliorer mes records personnels, 25 secondes 77/100e sur 200 m et 58 secondes 01/100e sur 400 m, si j’y parviens, la médaille ne sera peut-être pas loin », assure-t-elle.
« Je n’ai pas peur »
« Je sais que je vais être critiquée, que certains ne vont pas comprendre pour quoi je fais ça, mais je suis là, je me suis battue pendant des années pour en arriver là et je n’ai pas peur, je suis moi », martèle-t-elle. Valentina Petrillo se voit comme un symbole, et pas seulement dans une Italie où le gouvernement ultra-conservateur de Giorgia Meloni dénonce « l’idéologie du genre » et le « lobby LGBT ».
« Je dis souvent que si je l’ai fait, d’autres peuvent le faire. J’espère être la première de beaucoup d’autres, j’espère être une référence, une source d’inspiration (...) Mon histoire peut être utile à beaucoup d’autres, malvoyants ou non, trans ou non », assure-t-elle. Si son père, qui, assure-t-elle, l’a « toujours soutenue et comprise », est trop âgé pour venir à Paris, Valentina Petrillo sera encouragée au Stade de France par son fils, sa fille, son ex-femme et son frère. « J’ai de la chance : je vais faire la chose la plus belle que j’ai jamais rêvé de faire, courir dans un stade », conclut-elle.
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