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James Mangold sort les griffes sur les films de super-héros et les Blockbusters

Dans un entretien, le réalisateur de "Logan", qui cartonne en salle, évoque l'épuisement et le recyclage des recettes des films de super-héros, en même temps que celles des Blockbusters.

Non, il n'y a pas que Wolverine qui possède des griffes en adamentium. Le réalisateur de Logan aussi visiblement. Lorsque James Mangold décida de réaliser l'ultime volet des (més)aventures du personnage, il savait que son film ne ressemblerait en rien aux autres films de super-héros de l'écurie Marvel ou DC Comics. Ces films au coeur d'énormes franchises lucratives, baptisés Tentpole Movies aux Etats-Unis, qui se suivent et se ressemblent tous aux yeux du réalisateur. Des films qui sont surtout attachés "à bâtir un univers étendu et qui ressemblent davantage à des bandes-annonces de deux heures". Des oeuvres à des années lumières de l'univers intimiste de son Logan donc...

Dans une interview accordée à KCRW, Mangold développe son propos : "Les gros Blockbusters [NDR : "Tentpole Movies" en VO dans le texte] ne sont généralement pas de vrais films. Ce sont des exercices boursouflés, des bandes-annonces de deux heures d'un autre film qu'ils vous vendront dans deux ans. Il y a tellement de personnages que chacun a à peine droit à un arc narratif de six minutes et demi au mieux; et je n'exagère pas ! Vous avez 120 min, vous prenez déjà 45 min pour les scènes d'actions. Vous divisez ce qui reste entre les six personnages et vous obtenez l'arc scénaristique d'Elmer Fudd dans les cartoons Warner Bros. Pour moi, cette formule est totalement vide". Des propos qui font peur si l'on songe à la soixantaine de personnages prévus pour Avengers : Infinity War, dont on se demande déjà combien de temps chacun d'entre eux va apparaître à l'écran...

Toutefois, et c'est quand même important de le signaler, le cinéaste n'adresse pas un carton rouge à tous les films de super-héros. "Il y a eu de vraies réussites ces dix dernières années, comme Les Gardiens de la galaxie ou le premier volet d'Iron Man. Chacun portait l'empreinte et la personnalité de son réalisateur, mais l'univers global dans lesquels ils sont sortis est répétitif" précise Mangold.

Comme il n'y a pas de raisons de s'arrêter en si bon chemin dans la distribution de tacles, Mangold en colle un à l'esthétique globale des films de super-héros et plus largement des Blockbusters : "il y a des merdes explosant partout avec un son Dolby Atmos qui déchire l'arrière train pendant que mes yeux se retournent dans ma tête" lâche dans un langage châtié le réalisateur. "J'ai l'impression d'être comme Malcolm McDowell dans Orange mécanique [NDR : lorsque ce dernier subit le traitement Ludovico], ou alors je ne sais ni ne comprends absolument pas ce qui se passe à l'écran. De toute façon, mon cerveau est débranché".

Si Mangold a pu, in fine, faire le film qu'il souhaitait avec Logan, donc en ce sens louer le soutien de la Major Twentieth Century Fox, il rappelle aussi que celle-ci voulait toujours également son lot de scènes d'actions. Ce qui donne parfois des envies opposées et des incompréhensions mutuelles..."Le studio pensait que la partie qui intéressait surtout les fans, c'était le dernier tiers du film, alors que vous vous aviez l'impression que c'était le moins engageant. Le studio était inquiet sur les deux premiers tiers du film; j'avais l'impression de faire un film de Wong Kar Waï avec Wolverine dedans. Ils pensaient : "quand est-ce que tout ça va partir sur de bons rails et que nous allons enfin avoir un robot géant ? Pourtant, ce sont justement ces deux premiers tiers du film qui ont le mieux marché auprès du public" explique le cinéaste.