« J’imagine toujours le pire » : qu’est-ce que l’hypocondrie dont souffrait Michel Blanc ?

L’acteur Michel Blanc est mort à 72 ans dans la nuit du jeudi 3 au vendredi 4 octobre. Il aurait succombé à un œdème de Quincke selon plusieurs médias. En 2010, l’interprète du célèbre Jean-Claude Dusse expliquait au Figaro : « pour une toute petite douleur, ou une rougeur nouvelle, je consulte ! J’imagine toujours le pire. Il y a la peur de la mort derrière… ».

Le réalisateur précisait auprès de Paris Match en 2015 : « elle est plus liée au souffle au cœur décelé à ma naissance. J’ai été élevé dans du coton. On me répétait sans cesse que j’étais fragile, ça ne rassure pas. » Plus tard à l’adolescence, c’est le cancer de sa mère qui a exacerbé une peur de la mort profondément ancrée « Je me réveillais et je me disais : ‘Le cancer s’étend, ça touche les poumons, elle va mourir’ (…) L’angoisse de perdre un être aimé a définitivement brisé l’enfant en moi ».

Selon la 4e édition du Manuel diagnostique et statistique des troubles mentaux (DSM-IV), l’hypocondrie est une « préoccupation centrée sur la crainte ou l’idée d’être atteint d’une maladie grave, fondée sur l’interprétation erronée par le sujet de symptômes physiques ». Autre élément de définition, le patient refuse de croire le diagnostic du médecin et n’est pas réceptif à ses tentatives de le rassurer quant à l’absence d’une maladie grave.

Quels sont les symptômes ?

Le patient craint d’être atteint ou de développer une maladie grave. Cette peur altère son fonctionnement social et professionnel et peut provoquer une importante détresse et un retentissement sur la vie familiale notamment. Certaines personnes s’autoexaminent de façon répétée (vérification de la peau à la recherche de lésions, prise du pouls, examen de la gorge dans le miroir…).

Tandis que certains patients vont multiplier les consultations et n’hésitent pas à changer de médecin, d’autres craignent au contraire de demander un avis médical. Enfin, le patient ne présente pas, ou de légers, de symptômes somatiques.

Selon le manuel MSD, « le diagnostic de trouble anxieux lié à la maladie est confirmé si la personne continue à être anxieuse à propos de la maladie pendant au moins 6 mois, alors qu’elle n’a pas de symptômes ou seulement des symptômes légers, et qu’elle a été rassurée parce que l’examen médical a écarté toute possibilité de maladie ou a identifié un trouble léger qui ne justifie pas son anxiété ».

Quels sont les traitements ?

Selon ce même site, le soutien d’un médecin de confiance peut être utile, avec un médecin généraliste notamment. Une thérapie comportementale et cognitive semble indispensable. La prise d’antidépresseurs peut également aider.

« L’entourage ne doit pas dire aux hypocondriaques : Mais non, tu n’as rien ! L’hypocondrie est une vraie maladie psychique. Il faut donc les aider à comprendre que ce ne sont pas les médecins du corps qui pourront les aider, mais plutôt les psy », expliquait en 2014 au Parisien, Michèle Declerck, psychologue. La difficulté étant de les convaincre à consulter un médecin spécialiste.

Un trouble pas si rare

Renommé trouble anxieux lié à la maladie dans le DSM-V – le terme d’hypocondrie ayant été jugé trop péjoratif – ce trouble n’est pas si rare. Selon une enquête Ifop pour Capital Image en 2014, 13 % des Français déclaraient craindre d’être atteint d’une maladie ou en train d’en développer une même en l’absence de tout symptôme. 74 % d’entre eux déclaraient chercher beaucoup d’informations concernant cette maladie sur internet. 64 % d’entre eux déclaraient que plus ils s’informaient sur la maladie, plus ils craignaient de développer cette maladie. Et 44 % déclaraient consulter plusieurs médecins et réaliser plusieurs examens pour être rassurés.

A noter : selon une étude suédoise publiée en décembre 2023 dans le journal Jama Psychiatry, les personnes qui souffrent d’hypocondrie ont un risque accru de mourir de causes naturelles ou non, en particulier de se suicider. Le taux de mortalité global était plus élevé chez les personnes souffrant d’hypocondrie, soit 8,5 contre 5,5 pour 1000 années-personnes (qui prend en compte le nombre de personnes et la durée pendant laquelle elles ont été suivies). Les personnes atteintes d’hypocondrie sont mortes plus jeunes que les autres, à un âge moyen de 70 ans contre 75 ans. Et le nombre de suicide était multiplié par 4.