“Comment j’ai commencé à douter” : une ancienne propagandiste de Corée du Nord décrit son parcours
Cela fait déjà huit ans que je me suis enfuie de Corée du Nord. Durant tout ce temps, on m’a souvent demandé ce que je faisais comme métier quand je vivais en RPDC [République populaire démocratique de Corée].
En fait, je travaillais comme propagandiste de la politique du parti [unique, le Parti du travail de Corée]. J’habitais à Taehongdan, une petite ville située au pied du mont Paektu, à la frontière avec la Chine, le long du fleuve Tumen.
Dans les années 1990, pendant et après la période de la “marche forcée” [un euphémisme pour désigner la grande famine qui a touché le pays à partir de 1994], de nombreux Nord-Coréens originaires de tout le pays ont fui par cette frontière, en traversant les fleuves Yalu ou Tumen dans une tentative désespérée d’assurer leur survie.
Face à ces défections massives, le gouvernement nord-coréen a décidé de faire tout ce qui était en son pouvoir pour empêcher d’autres personnes de s’enfuir. Il a notamment ordonné l’intensification des perquisitions à domicile dans la zone frontalière, pour retrouver les personnes extérieures à la région.
Les yeux et les oreilles du parti
Afin d’empêcher ces dernières de pénétrer dans les villages situés le long de la frontière, des patrouilles procédaient également à des rondes la nuit, en se relayant toutes les deux heures. J’ai encore en mémoire les mots prononcés par le responsable du groupe de surveillance du quartier, qui nous a expliqué la politique du gouvernement : “Alors que les envahisseurs américains et leurs marionnettes sud-coréennes poussent sans arrêt leurs espions à détruire notre république, nous ne pouvons pas baisser notre garde, ne serait-ce qu’une seconde. Nous devons protéger notre pays en devenant ses yeux et ses oreilles.”
En y repensant aujourd’hui, je me rends compte que le but réel de ces contrôles frontaliers des autorités, c’était d’empêcher les défections de ses propres citoyens – et non d’empêcher des porteurs de l’influence étrangère d’entrer dans le pays par la frontière chinoise.
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