"J'étais devant un dilemme": François Hollande revient sur la grâce accordée à Jacqueline Sauvage

François Hollande le 7 mai 2022 à l'Elysée - GONZALO FUENTES / POOL / AFP
François Hollande le 7 mai 2022 à l'Elysée - GONZALO FUENTES / POOL / AFP

Le 28 décembre 2016, le président de la République François Hollande annonçait accorder la grâce présidentielle à Jacqueline Sauvage. En 2012, cette femme avait abattu à coups de fusil son mari, après des années de violences et d'abus sexuels sur elle et ses filles. Elle avait été condamnée à dix ans d'emprisonnement pour cet acte, condamnation qui avait provoqué dans la société un débat sur la légitime défense et les violences conjugales.

Le président d'alors avait été interpellé sur le sujet. Il raconte à RTL comment et pourquoi il a pris la décision de gracier cette femme.

"Je ne devais pas remettre en cause l'autorité de la chose jugée"

Dans un premier temps, François Hollande demande une enquête sur ce cas au ministère de la Justice, et interroge lui-même les avocates de Jacqueline Sauvage et des membres de sa famille, pour mieux comprendre l'histoire de cette femme.

"Quand j'ai écouté les filles, je n'ai pas eu de doute sur le soutien qu'elles apportaient à Jacqueline Sauvage et ce qu'elles avaient elles-mêmes eu à endurer, y compris de violences et d'agressions", explique-t-il.

Mais le chef d'État hésite car pour lui la grâce est "une façon de contourner la justice, et dès lors qu'il y avait deux cours d'assise qui avaient condamné Jacqueline Sauvage, je ne devais pas remettre en cause l'autorité de la chose jugée". "J'étais devant un dilemme", explique-t-il, entre sa position face à la Justice et "cette cause que représentait Jacqueline Sauvage", des violences faites aux femmes.

Le président accorde alors une grâce partielle à la condamnée: elle permet à Jacqueline Sauvage de demander une libération conditionnelle. François Hollande remet donc en question la décision de Justice mais ne la contourne pas, car c'est à un juge d'application des peines de prendre cette décision. La demande est toutefois rejetée par la Justice.

"C'est la bonne décision"

"J'attends quelques semaines et puis, à la fin de l'année 2016, je prends la décision d'accorder la grâce totale", raconte-t-il, parlant d'une "décision difficile".

Toutefois quand il signe, il explique être "convaincu que c'est la bonne décision. C'est une décision humaine, et c'est le rôle aussi du président de la République d'apporter de l'humanité, y compris sur des situations aussi douloureuses."

Pour lui, cette décision a permis d'ouvrir les esprits au drame des violences conjugales dans notre société, alors que le terme féminicide n'était pas connu comme actuellement, cela a permis de changer "le regard sur les femmes qui sont victimes de violences."

Toutefois, François Hollande le répète, pour lui "le droit de grâce doit être vraiment exceptionnel".

Jacqueline Sauvage est morte en 2020, à l'âge de 72 ans.

Article original publié sur BFMTV.com