Jérôme Fehrenbach, historien : « L’ordonnance de Villers-Cotterêts marque l’unification juridique »
Qu’est-ce que l’ordonnance de Villers-Cotterêts, et dans quel contexte historique est-elle signée ?
C’est un texte assez long, fondateur et important, qui traite de domaines variés parmi lesquels l’administration publique, l’état civil et le notariat. Il a été promulgué en 1539, au cœur de la Renaissance, période charnière pour les arts et les lettres français, dont plusieurs éléments historiques en expliquent l’évolution. On connaît François Ier pour les guerres qu’il a conduites en Italie, pour le Collège de France qu’il a fondé en 1530 et par-dessus tout pour le courant humaniste qu’il a importé et incarné en France. Côté linguistique, ce mouvement intellectuel et artistique a permis d’expurger la langue française de certaines lourdeurs et éléments médiévaux et d’y réinsérer des termes latins et grecs issus de l’Antiquité. Le français est alors toiletté, rafraîchi, rehaussé en qualité. Ensuite, l’homogénéité du langage est renforcée par l’intégration de la Bretagne – l’une des dernières terres françaises échappant à l’influence latine – au territoire français, après le mariage en 1499 de Louis XII et d’Anne de Bretagne. Enfin, le siècle de François Ier est celui de la rivalité avérée avec l’empire des Habsbourg d’Autriche, qui voit notamment se déployer une incroyable œuvre administrative en 1512, l’ordonnance impériale pour l’instruction des notaires publics. Un texte long et très bien construit, dont le souverain français s’inspirera vingt-sept ans plus tard afin de m...