Iran: L'aide aux victimes du séisme, terrain d'affrontement politique
par Parisa Hafezi
ANKARA (Reuters) - Conservateurs et modérés iraniens, qui s'opposent depuis plusieurs années, ont trouvé un nouveau terrain d'affrontement politique: les secours apportés à la population après le tremblement de terre qui a fait 530 morts et des milliers de blessés dimanche dans l'ouest du pays.
Les médias proches de la fraction la plus dure du régime ont accusé le gouvernement du président Hassan Rohani d'avoir mis trop de temps à réagir et ont salué le rôle majeur des Gardiens de la révolution, les pasdarans farouchement fidèles à l'ayatollah Ali Khamenei, dans l'aide apportée aux victimes.
"Rohani est très populaire et il est vraiment triste de voir certains, dans d'aussi tristes circonstances et alors que nous devrions rester unis, attaquer le gouvernement et le taxer d'incompétence", a déclaré à Reuters un allié du président.
Le séisme d'une magnitude de 7,3 sur l'échelle de Richter, le plus violent depuis plus de dix ans en Iran, a détruit plusieurs villages dans la province de Kermanshah, près de la frontière irakienne.
Téhéran a refusé l'aide étrangère, affirmant que des cargaisons entières de tentes, de couvertures, de matelas et de vivres étaient arrivées par avion dans les zones sinistrées.
Les agences de presse Tasnim et Fars, proches des "durs" du régime, ont souligné le rôle des pasdarans et de la milice Basij dans les opérations de secours.
L'ayatollah Khamenei, Guide suprême de la révolution, est lui-même intervenu pour demander aux administrations d'accélérer les secours. "Ce désastre est un test pour les autorités qui doivent être à la hauteur de leur tâche", a-t-il dit mardi.
"CORRUPTION"
L'un de ses proches, Abdolhossein Moezi, s'est rendu dans les zones sinistrées et a estimé que les secours fournis n'étaient toujours pas suffisants.
Les éditorialistes de la presse la plus conservatrice ont accusé le gouvernement de n'avoir pas tiré les leçons du séisme de Bam qui avait fait 31.000 morts en 2003.
La télévision publique a largement couvert l'action des Gardiens de la révolution dans la ville de Sarpol-e Zahab, l'une des plus touchées par le tremblement de terre.
"Immédiatement après le séisme, les Gardiens de la révolution sont arrivés dans la région pour apporter leur aide", a expliqué le général Hossein Salami, numéro deux de ce corps d'élite. "Nous avons installé des abris, des hôpitaux de campagne et nous ne partirons pas tant que tous les rescapés n'auront pas un abri permanent."
De nombreux immeubles qui se sont effondrés ou qui ont été endommagés à Sarpol-e Zahab avaient été construits dans le cadre d'un projet immobilier lancé en 2011 par le prédécesseur du président Rohani, le très conservateur Mahmoud Ahmadinejad.
Certains survivants ont mis en cause la mauvaise qualité de la construction, qui expliquerait selon eux l'ampleur des dégâts.
Hassan Rohani a demandé une enquête. "Il est clair qu'il y a eu de la corruption à propos de ces contrats de construction", a-t-il dit mercredi en conseil des ministres. "Les responsables seront punis."
Un conseiller d'Ahmadinejad, Ali Akbar Javanfekr, a rejeté ces accusations, dénonçant "une campagne de propagande visant à masquer les insuffisances et l'incompétence du gouvernement Rohani".
(Guy Kerivel pour le service français, édité par Tangi Salaün)