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Intestin irritable, maladie de Crohn… L’épreuve des maladies intestinales dans le couple

Detail of a young woman in home clothes sitting on her sofa holding her lower stomach with both hands in pain leaning forwards.
MarianVejcik / Getty Images/iStockphoto Detail of a young woman in home clothes sitting on her sofa holding her lower stomach with both hands in pain leaning forwards.

SANTÉ - La peur du rejet, la difficulté d’assumer une maladie aux symptômes handicapants. Trouver mille excuses pour expliquer quinze passages aux toilettes durant le dîner ou se retenir de passer la nuit chez l’autre de peur d’avoir une crise qu’on ne pourra pas cacher.

C’est ce malaise dont Perrine, candidate de la nouvelle saison de L’Amour est dans le pré diffusée ce lundi 6 février, souhaite se débarrasser. Diagnostiquée de la maladie de Crohn, une inflammation chronique du tube digestif, la jeune femme a eu du mal à dépasser ce diagnostic et à trouver un partenaire. Aujourd’hui, elle « espère se délester dès le début d’un moment souvent embarrassant et souhaite que ceux qui lui écriront puissent le faire en toute connaissance de cause », peut-on lire dans le communiqué de M6.

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Le syndrome de l’intestin irritable, la maladie de Crohn ou encore la rectocolite hémorragique (RCH) sont des troubles et maladies intestinales chroniques aux multiples symptômes. Elles entraînent notamment des diarrhées, une fatigue extrême et des douleurs abdominales intenses. « Bon, clairement, ce n’est pas ce qu’il y a de plus sexy, plaisante Amélie Renier, 34 ans et atteinte de la RCH. Ça fait mal, ça arrive sans prévenir et ça peut nous laisser bloquer aux toilettes pendant des heures. Alors quand tu essayes de séduire quelqu’un, tu ne mets pas forcément ce côté-là de toi en avant. »

« Que faire si j’ai une envie pressante ? »

La majorité des patients reçoivent un diagnostic de maladie de Crohn ou de RCH au cours de leur vingtaine, ce qui peut compliquer encore plus les choses. « C’est précisément la période où la majorité d’entre eux commence à construire leur vie amoureuse et sexuelle », explique le Pr Laurent Peyrin-Biroulet, gastro-entérologue spécialiste des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI). Même s’il n’est pas toujours évident pour les patients d’aborder ces sujets avec leur médecin, « c’est primordial de le faire. Et quand on le fait, les patients ont très envie d’en parler, ils ont beaucoup de questions », précise le Professeur.

Jérémy Martineau, atteint de la maladie Crohn, était très angoissé à l’idée « que cela ne soit qu’un tue-l'amour et qu’[il] reste célibataire toute [sa] vie ». Plusieurs fois, comme Amélie, il a caché sa maladie à ses partenaires. « Je me posais tout un tas de questions à chaque fois : “Dois-je en parler au premier rendez-vous ? Si oui, comment ? Que faire si j’ai une envie pressante ?” », raconte le jeune homme de 29 ans.

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Lors du deuxième rendez-vous amoureux avec celle qui deviendra sa femme, Jérémy était « en crise », soit dans un moment où la maladie se manifeste plus particulièrement. Durant le dîner, le contrôleur de gestion s’est rendu aux toilettes entre cinq et huit fois. « J’ai prétexté des appels, j’ai même fait exprès de renverser un peu de sauce sur ma chemise pour pouvoir excuser le fait que j’aille encore aux toilettes », raconte-t-il. Mais au bout de la troisième fois, sa compagne commençait à s’agacer et Jérémy s’est jeté à l’eau.

« Je m’en faisais tout un monde mais au final, elle a été super compréhensive et curieuse d’en savoir plus », confie-t-il. Une réaction qui a rassuré le jeune homme et lui a permis de parler ouvertement de sa pathologie.

Le syndrome de la princesse

Le poop-shaming - comprendre, la « honte du caca » - est toujours très présent et peut être une grande source de stress et de complexes. Surtout pour les femmes, victimes du « syndrome de la princesse » - l’idée selon laquelle elles doivent rester propres et élégantes en toutes circonstances.

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« Ça m’a énormément travaillée, avoue Amélie. Pendant mes rapports sexuels, j’avais peur d’être prise d’une envie pressante ou d’un gaz. » L’infirmière lilloise a déjà vécu une mauvaise expérience avec un ancien partenaire qui n’acceptait pas qu’elle puisse aller autant aux toilettes. « En fait, tant que je n’étais pas en crise, ça allait, mais le jour où je suis restée des heures aux toilettes à cause des diarrhées, il m’a dit que ça le dégoûtait. Je ne pouvais pas me retenir et lui, il me demandait de cacher un peu les bruits et les odeurs parce qu’il ne trouvait pas ça féminin », raconte-t-elle.

Si, aujourd’hui, Amélie s’est séparée de ce compagnon et a une vie amoureuse épanouie, cette réflexion l’a longtemps noyée dans la honte. « Il est attendu des femmes qu’elles soient dans la maîtrise de leur corps. Les stéréotypes de genre veulent que leurs corps soient muets. Les manifestations corporelles, bruits ou odeurs, sont ainsi plus admises chez les hommes », précise Leslie Fonquerne, sociologue spécialiste du genre et des professions de la santé.

Se réapproprier son corps

Sans surprise, la dysfonction sexuelle est aussi courante chez les personnes atteintes de maladies intestinales. Selon une étude de la European Crohn’s and Colitis Organisation publiée en 2020, « près d’une femme sur deux et un homme sur six » ayant une MICI a des problèmes d’ordre sexuel.

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Fatigue, douleurs, gêne, image corporelle négative, baisse de la libido induite par les médicaments… Un tas de raisons expliquent les difficultés à avoir une vie sexuelle satisfaisante. D’autant plus que les anti-inflammatoires, immunosuppresseurs et traitements d’entretien peuvent avoir des effets visibles sur le corps. La première étape consiste donc « à se le réapproprier », explique l’association François Aupetit (Afa), qui lutte contre les MICI.

« Lorsque les rapports sont compliqués ou impossibles, maintenez la proximité et le contact physique avec votre partenaire et rappelez-vous que la peau représente le plus grand organe sexuel. Privilégiez alors étreintes, caresses, baisers ou massages », recommande l’Afa.

Cela peut paraître évident, mais il faut garder en tête que les maladies intestinales ne se contrôlent pas. Il est normal que les malades ne soient pas toujours dans la capacité d’assurer une vie sexuelle comme ils le voudraient. « Il faut déculpabiliser les patients parce qu’ils n’y sont pour rien. Il ne faut pas avoir honte de quelque chose que l’on ne peut pas changer », avance le Pr Laurent Peyrin-Biroulet.

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