Interdiction de l’abaya : le Conseil français du culte musulman dénonce « le flou » autour de la définition du vêtement
RELIGION - L’interdiction de l’abaya dans les écoles crée des « risques élevés de discriminations », s’est inquiété mardi 5 septembre le Conseil français du culte musulman (CFCM), qui évoque la possibilité de saisir à ce sujet le Conseil d’État. L’abaya « n’a jamais été un vêtement ou une prescription religieuse », a rappelé l’association.
L’absence « d’une définition claire de ce vêtement crée de fait une situation floue et une insécurité juridique », estime le CFCM, notamment car dans certains contextes l’abaya pourrait être considérée comme « musulmane » - et donc interdite - et dans d’autres comme « non musulmane » - et donc autorisée.
De ce fait, le CFCM dit craindre un « contrôle au faciès arbitraire » ou que les critères d’évaluation de la tenue des jeunes filles reposent sur « l’origine supposée, le nom de famille ou la couleur de peau ». En conséquence, l’instance « se réserve le droit de saisir le Conseil d’État si l’application concrète de cette mesure d’interdiction aboutissait à des formes de discrimination ».
Le CFCM ne défend pas la « abaya » ou la robe longue en soi. Mais, il craint qu’on arrive à la situation inédite où dans une classe, une même robe pourra être portée par une jeune fille car supposée « non musulmane » et interdite à sa camarade car supposée « musulmane ».@AFP pic.twitter.com/tvOTc4sfyu
— CFCM (@CfcmOfficiel) September 4, 2023
Le gouvernement a annoncé fin août l’interdiction dans les établissements scolaires de ce vêtement long porté par les femmes dont le caractère religieux a longtemps fait débat. Près de 298 élèves se sont présentées en abaya devant leur établissement scolaire lundi, jour de rentrée, et 67 d’entre elles ont refusé de la retirer, selon des chiffres annoncés mardi par le ministre de l’Éducation nationale Gabriel Attal.
Le Conseil d’État examine le recours déposé par l’ADM
Le Conseil d’État a examiné ce mardi après-midi un recours en référé déposé par l’association Action Droits des Musulmans (ADM) contre la décision du ministre. Pendant près de deux heures, le débat a beaucoup tourné autour de la portée religieuse du vêtement. « Abaya signifie robe, manteau », a lancé l’avocat de l’association Vincent Brengarth, en soulignant que le Conseil français du culte musulman (CFCM) « a rappelé de façon assez catégorique que l’abaya ne pouvait pas être considérée comme un vêtement religieux mais traditionnel ».
« Le sujet n’est pas de savoir si l’islam prescrit le port de ce vêtement » mais « l’abaya fait immédiatement reconnaître celui qui le porte comme appartenant à la religion musulmane », a rétorqué Guillaume Odinet, directeur des affaires juridiques du ministère de l’Éducation.
Intervenant plusieurs fois pendant l’audience, la présidente de l’ADM Sihem Zine a estimé que « cette circulaire est sexiste, elle ne vise que les filles ». « Ce sont les Arabes qui sont visés, c’est ça le vrai débat », a-t-elle ajouté. La décision du Conseil d’Etat sera rendue sous 48 heures.
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