Insultes, coups, harcèlement... Deux tiers des infirmiers ont déjà été victimes de violences au travail

"Le drame qui a touché notre consœur Carène Mezino, tuée alors qu'elle exerçait son métier, montre à quel point notre profession est exposée aux agressions et aux brutalités de toute sorte", exprime dans un communiqué ce jeudi Patrick Chamboredon, président de l'Ordre National des Infirmiers.

L'Ordre révèle ce jour les résultats d'une consultation menée sur 31.281 infirmiers à travers le pays qui montre que deux tiers d'entre eux ont déjà été victimes de violences dans leur exercice professionnel, tandis que 73% en ont été témoins.

Insultes, coups, menaces...

Des chiffres alarmants. Pour 40% d'entre eux, il s'agit d'une situation qui se produit "plusieurs fois par an" et 15% "toutes les semaines ou presque". D'autres, 4% des infirmiers interrogés, disent vivre cela quasiment tous les jours.

Les violences sont de tout type. Trois infirmiers sur quatre ont été victimes ou témoins d'insultes, près de la moitié de menaces physiques ou de dénigrement. Plus d'un tiers d'entre eux (37%) évoque des coups et 16% des menaces de mort. Dans environ 5% des cas, l’agresseur a utilisé une arme.

La plus grande partie des auteurs de ces violences sont les patients (66%) mais elles peuvent également venir de proches de ces derniers (43%).

S'attaquer aux "causes structurelles" des violences

Cette consultation menée par l'Ordre National des Infirmiers montre que les principales causes invoquées sont les reproches liés à la prise en charge (48%), les troubles cognitifs (42%), l’état d’ébriété ou de prise de stupéfiant (23%) ou le temps d’attente jugé trop long (28%).

Face à ce constat, l'Ordre demande aux pouvoirs publics "le traitement des causes structurelles des violences, qui ne se réduisent pas qu’à la responsabilité de leurs auteurs: manque de personnel, pressions sur les soignants, désorganisation entraînant tensions et surmenage".

Dans ses propositions rendues publiques en marge d'une réunion du ministère de la Santé sur la sécurité des soignants, il requiert également un régime de sanctions renforcées ainsi qu'un investissement massif dans le secteur de la psychiatrie.

Violence interne

En outre, les infirmiers attestent aussi, pour un tiers d'entre eux, avoir été victimes ou témoins de violences exercées par un autre soignant ou un membre de la structure. En effet, ils témoignent également d'un climat difficile au sein des établissements.

Ainsi, 72% ont déjà ressenti des formes de violences de la part des institutions pour lesquelles ils travaillent ou dont ils dépendent quand 25% disent avoir été victimes de harcèlement professionnel.

L'Ordre National des Infirmiers veut encourager les personnes concernées à "déclarer les violences qu'ils subissent" puisque 38% des répondants confient n'avoir effectué aucune démarche après une violence car ils estimaient soit qu’elle n’aboutirait pas (43%), soit que cela serait inutile (34%), ou encore qu'elle ne serait pas soutenue (34%).

26% envisagent de quitter la profession

En conséquence de tout cela, plus de la moitié des infirmiers ne se sentent pas en sécurité sur leur lieu de travail, que cela soit à l'hôpital, en domicile ou encore en Ehpad ou en clinique.

"Ces violences ne peuvent que porter atteinte à l’attractivité du métier et à la fidélisation des soignants, alors que beaucoup d’infirmiers s’interrogent sur leur avenir dans la profession", déplore l'Ordre National des Infirmiers dans un communiqué.

En effet, 97% des interrogés considèrent que leurs conditions de travail deviennent de plus en plus difficiles et un sur quatre envisage de quitter la profession dans les douze mois.

Article original publié sur BFMTV.com