Inondations en Espagne : Valence épargnée mais le détournement d’un fleuve a aggravé les conséquences
ESPAGNE - Une solution qui atteint ses limites. Si le sud-est de l’Espagne, subit des inondations monstres depuis mardi en raison de pluies torrentielles, la ville de Valence est épargnée par les eaux. Un contraste étonnant, qui s’explique par un choix fait dans les années 60 de détourner le fleuve qui traversait la ville, la Turia. Mais ce déplacement du fleuve, pensé à une époque où l’urbanisation et les événements climatiques extrêmes étaient moindres, montre aujourd’hui ses limites.
Cette déviation avait été motivée par l’inondation catastrophique de 1957, lorsque des pluies torrentielles avaient déversé 300 litres d’eau par mètre carré en 24 heures sur Valence, soit l’équivalent d’une année de pluie. La montée des eaux, qui avait atteint jusqu’à 3 mètres dans certaines rues, avait provoqué la mort d’au moins 81 personnes et la destruction de 1700 maisons.
En réponse à la tragédie, les autorités avaient décidé de retirer le lit du Turia du centre de Valence et de complètement remodeler son cours, le déplaçant en bordure sud de la ville. Le projet colossal, avait été approuvé en 1962, et les travaux ont été terminés dix ans plus tard. Depuis les années 70, plusieurs épisodes d’inondations ont été évités grâce à cette infrastructure, mais cette semaine, le quartier de Pinedo, situé juste à côté de l’embouchure du nouveau lit de la rivière Turia, a été inondé de manière impressionnante, rapporte El Mundo.
« La plus mauvaise solution est de vouloir canaliser les rivières. » Clément Gaillard, urbaniste spécialiste des projets bioclimatiques dans Le Parisien.
« Quand on détourne des cours d’eau, c’est-à-dire qu’on essaie de les contrôler, on augmente la vitesse des écoulements, puisque lorsqu’un fleuve est droit ou sous forme de canal, l’eau va bien plus vite que s’il y avait des méandres », analyse Amandine Richaud, urbaniste spécialiste de l’environnement, au micro de franceinfo ce vendredi. Résultat, cette déviation cause « des torrents sur des zones qui devraient être des zones tampons pour absorber l’eau », résume-t-elle.
« La plus mauvaise solution est de vouloir canaliser les rivières », dit aussi dans Le Parisien Clément Gaillard, urbaniste spécialiste des projets bioclimatiques.
Rendre les sols perméables pour éviter les inondations
À la place, mieux vaut se tourner vers la renaturation des cours d’eau, et la mise en place de zones tampons dans les villes : des bassins d’infiltration, des jardins de pluie, des toitures végétalisées. Grâce à ces aménagements, l’eau ne va non pas ruisseler et créer de puissants torrents comme c’est le cas dans la région de Valence à l’heure actuelle, mais plutôt s’infiltrer en profondeur dans le sol, ce qui limite considérablement les inondations.
Construire ce canal au sud de la ville, « c’était sans doute une bonne idée à l’époque où il n’y avait dans cette partie de Valence que des vergers qui faisaient l’interface entre la zone inondable à risque et le reste de la ville. Sauf qu’aujourd’hui, cette partie de la ville a été totalement urbanisée », souligne Clément Gaillard.
Selon ses calculs, en 55 ans, l’agglomération de Valence a détruit 9 000 hectares de verger (quasiment la superficie de Paris intra-muros) sous l’action de l’urbanisation. Or ces zones sont imperméables, et donc plus facilement inondables.
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