Inondations en Espagne: l'alerte des autorités donnée trop tard? Les critiques se multiplient
Après la tristesse, place à la colère. Deux jours après les violentes intempéries accompagnées d'inondation subites qui ont fait au moins 158 morts et des dizaines de disparus dans le sud-est de l'Espagne, des critiques fusent quant au manque d'anticipation et de réaction des autorités locales alors que des pluies diluviennes s'abattaient déjà mardi 29 octobre en fin de journée sur la région de Valence.
Sur les réseaux sociaux, de nombreux utilisateurs pointent l'heure à laquelle l'alerte a été donnée par la protection civile de la Generalidad Valenciana, l'institution du gouvernement autonome dela Communauté valencianne.
"La gestion des événements de Valence a été négligente et irresponsable. Des personnes sont mortes à cause de l'incompétence des responsables", écrit ainsi sur X l'avocate Isabel Díaz.
Sur le même réseau social, l'eurodéputée PSOE et ancienne conseillère municipale de Valence, Sandra Gómez, a pour sa part tancé le manque d'informations diffusées alors que le phénomène météorologique était le plus intense.
Elle pointe le fait que son mari s'est retrouvé bloqué sur l'autoroute submergée par les eaux, et n'a dû son salut qu'à "un mélange de chance et de réflexes." Dans sa réflexion, elle est rejointe par des dizaines d'autres internautes qui accusent les autorités régionales d'avoir trop traîné avant de donner l'alerte.
Des heures d'inaction
Alors que le plus fort des intempéries a eu lieu entre 16h30 et 20h30 mardi 29 octobre, période durant laquelle des milliers de mètres carrés d'eau se sont abattus sur Valence et ses environs, le système d'alerte Es-Alert, identique au FR-Alert français, n'a été utilisé qu'à 20h12.
En clair, un message d'alerte accompagné d'une sonnerie stridente est arrivé sur les téléphones de centaines de milliers de personnes alors que des villages et quartiers entiers étaient déjà submergés par la montée rapide des eaux. Cette notification conseillait, entre autres, de limiter les déplacements dans la zone.
L'Agence d'État de météorologie espagnole (l'AEMET) avait pourtant passé la région de Valence en vigilance rouge pour intempéries violentes et donné l'alerte dans son bulletin de 7h. Les jours précédents, ce même institut météotologique avait déjà averti de l'arrivée d'une goutte froide sur le sud-est du territoire.
Comme l'explique le quotidien espagnol El Correo, la Confédération hydrographique de Júcar, organisme en charge de la réglementation des actions engagées dans les réseaux hydrologiques de la région, a pour sa part alerté de la situation à la mi-journée.
Or, selon le quotidien catalan La Vanguardia, il était déjà 17h lorsque le Centre de coordination d'urgence de la Generalidad Valenciana (CECOPI) s'est réunie, avant une alerte lancée plus de trois heures plus tard.
À Paiporta, commune martyre ou 62 personnes ont trouvé la mort, la maire Maribel Albalat ne décolère pas. "Il n'y a eu aucun avertissement", déplore-t-elle auprès de la TVE.
"La prévention consiste à anticiper ce qui pourrait arriver… à aucun moment il n’a été question d’évacuer les maisons ou de faire en sorte que les gens ne prennent pas leur voiture. Il n’y a rien de tout cela. On ne peut pas envoyer d’alertes quand le pire est déjà arrivé" abonde pour sa part Cardona Teruel, une habitante de la commune.
"Nous avons suivi les protocoles"
Face aux critiques, le pouvoir central de Madrid et celui local de la Communidad valenciana se renvoient la balle. Ce jeudi, le ministère de l'Intérieur a tenu à préciser que la responsabilité de ces alertes incombe bien aux communautés autonomes, comme l'est celle de Valence.
Selon Madrid, les entités locales sont censées recevoir les avis liés à de possibles risques, analyser leur impact et déterminer le niveau d'urgence à décreter afin de protéger la population.
Après un silence assourdissant de plusieurs heures sur le sujet, Carlos Mazón, président de la Communidad valenciana, a défendu jeudi sa gestion de la crise et des alertes diffusées à la population.
"Nous avons suivi les protocoles" standardisés et coordonnés par la Direction générale de la protection civile du gouvernement espagnol, a-t-il répondu, ajoutant que lui et ses collaborateurs n'étaient "pas météorologues."
Les politiques locaux points du doigt
Malgré ces explications, la situation devient de plus en plus intenable pour Mazón, conservateur du Parti populaire (PP) arrivé à la tête de la région en 2023.
Ces dernières heures, de nombreux adversaires politiques lui ont rappelé l'une de ses premières décisions à son arrivée au pouvoir, était celle de la suppression par décret de l'Unité d'Urgence de Valence (UVE), estimant que celle-ci était inefficace.
Cette dernière, créée par le gouvernement socialiste antérieur, était un organisme de coordination de l'action des pompiers, destiné à répondre aux catastrophes climatiques, comme celle qui touche actuellement la région de Valence.
Ce jeudi, les recherches se poursuivent dans le sud-est espagnol afin de retrouver des dizaines de personnes qui manquent encore à l'appel. Épaulés par des drones et des chiens spécialisés dans les recherches de ce type, 2.500 militaires et membres de la protection civile sont mobilisés.