Inondations en Espagne: une identification rendue "difficile" par la détérioration des corps

Six jours après les terribles inondations en Espagne qui ont fait au moins 217 morts, la priorité reste la localisation des nombreuses personnes encore portées disparues. Et l'identification des corps, regroupés au Palais de justice de Valence qui a été transformé en morgue géante. Cette identification est compliquée par la détérioration des victimes au contact de l'eau.

Pour identifier un corps, la saisie des empreintes digitales, traits immuables de chaque individu, reste la procédure privilégiée. Le directeur d'Imelec, l'Institut de médecine légale et des sciences médico-légales de Catalogne (Imelec), explique au média espagnol ABC qu'une "comparaison" est faite entre "l'empreinte digitale post mortem" et "l'empreinte ante mortem" grâce à la base de données des documents nationaux d'identité, "obligatoire à partir de 14 ans" en Espagne.

"Des difficultés à utiliser la nécro-empreinte digitale"

"Le problème est qu'au fil des jours, en raison de l'état des corps en contact avec l'eau, il commence à y avoir des difficultés à utiliser la nécro-empreinte digitale", explique Eneko Barbería.

De son côté, un médecin légiste à l'Institut de médecine légale de Galice, Fernando Serrulla, se montre plus confiant auprès du quotidien El Mundo. Il estime que la grande majorité des cadavres "devraient pouvoir être identifiés par empreinte digitale dans un laps de temps relativement court", les tissus étant encore assez bien conservés après plusieurs jours d'immersion. Mais plus les corps restent longtemps dans l'eau, plus la procédure se complique.

Il existe alors d'autres solutions, comme l'identification dentaire ou l'identification ADN. Pour effectuer l'odontologie médico-légale, les médecins légistes peuvent utiliser le dossier dentaire de la victime, comprenant une radiographie par exemple, et effectuer une comparaison avec la dentition du cadavre.

Toutefois, ce processus d'identification peut être impossible chez des enfants en bas âge qui n'ont pas encore de dents ou ne sont jamais allés chez le dentiste. Ou encore chez les personnes qui "ont perdu leur prothèse buccale" au contact de l'eau, souligne auprès de ABC Narcís Bardalet, un expert retraité qui a aidé à l'identification des corps après le tsunami en Thaïlande en 2004.

L'identification ADN nécessite quant à elle plus de temps et de ressources que les autres procédures. Mais automatiquement lors d'une autopsie, des échantillons biologiques sont prélevés sur le corps par anticipation.

"Un échantillon d'ADN peut être prélevé sur n'importe quel vestige ou tissu, un profil qui peut être comparé à un échantillon ante mortem prélevé sur un ustensile personnel, comme une brosse à dents", explique Eduardo Osuna, professeur de médecine légale et médico-légale à l'Université de Murcie, à El Mundo.

Les experts rappellent que toutes les informations pouvant sembler secondaires aident également à la recherche. Comme un tatouage, une cicatrice particulière, un implant, une prothèse médicale numérotée...

Des corps numérotés

Pour réaliser l'identification des corps, un strict processus est respecté, régi par le décret royal 32/2009. Ce décret prévoit une coordination entre les médecins légistes, la police scientifique et le Centre de Données Intégré, chargé de recueillir des données sur les personnes disparues.

Une fois un corps retrouvé, une équipe médico-légale composée de médecins légistes, venus des quatre coins d'Espagne et de la police scientifique, se rend sur les lieux du décès pour étiqueter correctement le corps. En effet, pour aider à l'identification et à la traçabilité, "chaque commune concernée se voit attribuer un numéro, et le corps est localisé dans une zone, également numérotée", explique le directeur d'Imelec, Eneko Barbería. L'équipe médico-légale retourne ensuite au Palais de justice de Valence où sont regroupés les corps pour effectuer les prélèvements nécessaires.

"Tous les experts légistes sont conscients de l'importance de l'identification des corps des familles et je sais que de grands efforts sont déployés pour y parvenir", affirme Eduardo Osuna, professeur de médecine légale et médico-légale à l'Université de Murcie.

"Les professionnels qui effectuent ce travail sont des professionnels spécialisés, accrédités et suffisamment formés pour que les identifications soient réalisées avec le risque requis dans ces situations", ajoute-t-il.

Article original publié sur BFMTV.com