Ingérence russe: Trump partage les conclusions des agences du renseignement
par Steve Holland
HANOI (Reuters) - Donald Trump a déclaré dimanche qu'il partageait les conclusions des agences américaines du renseignement sur la réalité d'une ingérence russe dans l'élection présidentielle qu'il a remportée l'an dernier.
"Pour ce qui est de savoir si je le crois ou pas, je suis avec nos agences, surtout telles qu'elles sont actuellement constituées", a dit le président américain lors d'une conférence de presse à Hanoï. "Telles qu'elles sont actuellement dirigées, par des gens bien, je crois tout à fait à nos agences de renseignement."
Quelques heures plus tôt, à bord d'Air Force One, il avait pourtant dit croire en la sincérité de Vladimir Poutine, avec lequel il s'est brièvement entretenu samedi en marge du sommet du Forum de coopération économique Asie-Pacifique (APEC) et qui a réaffirmé que son pays n'avait pas cherché à s'immiscer dans l'élection de 2016 aux Etats-Unis.
"Chaque fois qu'il me voit, il me dit qu'il n'a pas fait ça, et je crois vraiment qu'il est sincère", avait déclaré le président Trump aux journalistes l'accompagnant dans sa tournée en Asie. "Je pense qu'il se sent très offensé par ça, ce qui n'est pas une bonne affaire pour notre pays", avait-il ajouté.
Plusieurs personnalités politiques américaines s'étaient émues que Trump accorde plus de crédit au président russe qu'à ses propres agences du renseignement, qui ont conclu à une ingérence de Moscou dans un rapport déclassifié début janvier, avant l'investiture du 45e président des Etats-Unis.
A Hanoï, Trump a précisé qu'une dispute avec Vladimir Poutine sur ce sujet ne l'intéressait pas et qu'il préférait travailler avec Moscou sur les problèmes du monde.
Mais il a également noté, au risque d'ajouter de la confusion, qu'il continuait de croire que Poutine ne pensait pas qu'une ingérence russe s'était produite. "Je crois que le président Poutine a vraiment le sentiment, et qu'il croit fermement, qu'il ne s'est pas immiscé dans notre élection", a-t-il dit, tout en ajoutant: "Qu'il pense ce qu'il pense."
"LA PAROLE D'UN COLONEL DU KGB"
Le président russe a réaffirmé samedi que la Russie n'avait pas cherché à s'ingérer dans l'élection présidentielle américaine de l'an dernier et a ajouté que le lien prétendu entre l'ancien directeur de campagne de Donald Trump, Paul Manafort, et Moscou avait été fabriqué de toutes pièces par les adversaires du président américain.
Les informations d'après lesquelles des proches du président russe ont eu des contacts avec l'équipe de campagne de Trump sont erronées, a ajouté Poutine lors d'un point de presse à l'issue du sommet de l'Apec à Danang, au Vietnam.
"Il n'y a aucune confirmation que nos médias de masse se soient livrés à des ingérences dans des campagnes électorales, et il ne peut pas y en avoir", a-t-il dit.
Dans un rapport déclassifié publié début janvier, la CIA (Central Intelligence Agency), le FBI (Federal Bureau of Investigation) et la NSA (National Security Agency) ont conclu à une ingérence de Moscou pour favoriser l'élection de Trump face à Hillary Clinton, jugée moins favorable aux intérêts de la Russie.
"Nous estimons que le président russe Vladimir Poutine a ordonné une campagne d'influence en 2016 ciblant l'élection présidentielle américaine", ont affirmé ces agences.
Réagissant au "brevet de sincérité" décerné par Trump à Poutine, le sénateur républicain John McCain, qui préside la commission sénatoriale des Services armés, s'est étonné que l'on puisse "placer la parole d'un colonel du KGB au-dessus de la communauté américaine du renseignement".
L'ancien directeur du renseignement national (DNI) James Clapper a rappelé quant à lui que Trump avait été informé des conclusions des agences américaines. "Le président Trump a reçu la preuve claire et irréfutable que la Russie a interféré dans l'élection", a-t-il dit à Reuters. "Le fait que le président place la parole de Poutine au-dessus de celle de la communauté du renseignement est tout simplement déraisonnable", a ajouté Clapper, qui a quitté ses fonctions quand Donald Trump est entré à la Maison blanche, le 20 janvier.
(avec Mark Hosenball et Mike Stone à Washington; Eric Faye et Henri-Pierre André pour le service français)