Publicité

Inflammation intestinale : attention aux émulsifiants alimentaires

Shot of unhealthy young woman with stomachache leaning on the bed at home.

Selon une récente étude, les émulsifiants alimentaires présents dans des plats transformés peuvent avoir un impact délétère sur certaines bactéries spécifiques conduisant à une inflammation chronique.

Près de vingt millions de personnes sont concernées par des maladies inflammatoires chroniques de l’intestin (MICI). Ces maladies, caractérisées par une inflammation de la paroi d’une partie du tube digestif, comportent de nombreuses pathologies comme la maladie de Crohn. La recherche a déjà prouvé que l’alimentation jouait un rôle dans le déclenchement des inflammations intestinales.

Une étude française va encore plus loin et s’intéresse à l’impact de certains additifs alimentaires. Des chercheurs de l’Inserm, du CNRS et de l’Université de Paris ont montré que “les émulsifiants alimentaires présents dans de nombreux plats transformés pouvaient avoir un impact délétère sur certaines bactéries spécifiques du microbiote intestinal, conduisant à une inflammation chronique”. Leurs résultats sont publiés dans la revue scientifiques Cell Reports.

Des émulsifiants omniprésents

Largement utilisés par l’industrie agroalimentaire dans de nombreux produits transformés, les émulsifiants permettent d’améliorer la texture et de prolonger la durée de conservation. “Par exemple, des émulsifiants comme la lécithine et les polysorbates permettent de garantir la texture onctueuse des crèmes glacées industrielles et d’éviter qu’elles ne fondent trop rapidement une fois servies”, détaille le communiqué de l’Inserm. Grâce à différentes études, les scientifiques avaient déjà confirmé que la consommation d’émulsifiants alimentaires impactait négativement le microbiote favorisant ainsi l’inflammation.

Pour cette étude, les chercheurs ont émis l’hypothèse que les émulsifiants pouvaient stimuler certaines bactéries inoffensives mais ayant un potentiel pathogène. “C’est seulement en présence d’agents émulsifiants que ces dernières seraient capables de favoriser le développement d’une inflammation intestinale chronique”, évoque l’Inserm. Alors pour le savoir, les chercheurs ont mis en place deux modèles de souris : l’un sans microbiote et l’autre avec un microbiote simple comportant seulement 8 espèces de bactérie. Ils les ont ensuite colonisés avec une souche de la bactérie Escherichia coli associée à la maladie de Crohn. Ils se sont intéressés aux effets de deux émulsifiants administrés suite à la colonisation des souris par les bactéries AIEC. “Alors que la seule consommation d’agents émulsifiants était inoffensive chez ces animaux en l’absence de ces bactéries, ils ont constaté le développement d’une inflammation intestinale chronique et de dérégulations métaboliques lorsque ces dernières étaient présentes”, résume l’Inserm.

Un mécanisme identifié

Ainsi, le couple bactéries AIEC / agent émulsifiant était nécessaire et suffisant pour induire une inflammation intestinale chronique. Des analyses supplémentaires ont révélé que lorsque ces bactéries étaient en contact avec les émulsifiants, elles sur-exprimaient des groupes de gènes qui augmentaient leur virulence et leur propension à induire l’inflammation, note l’Inserm. “Nous avons ainsi pu identifier un mécanisme par lequel les émulsifiants alimentaires peuvent favoriser l’inflammation intestinale chronique chez les personnes abritant certaines bactéries, telles que les bactéries AIEC, dans leur tractus digestif”, souligne Benoît Chassaing qui a coordonné cette étude.

À l’avenir, d’autres études pourraient permettre de lister toutes les bactéries ayant les mêmes réactions. Une avancée qui aiderait à identifier les patients en fonction de la composition de leur microbiote et donc de leur risque personnalisé d’inflammation. “Et s’il est illusoire de penser que l’on pourra bannir les émulsifiants de notre alimentation, les modèles et les méthodologies que nous avons développés ici vont aussi nous permettre de tester l’action de plusieurs types d’agents émulsifiants sur le microbiote afin d’identifier ceux qui n’auraient pas d’effets délétères, et ainsi encourager leur usage”, conclut Benoît Chassaing.