Un Indien accusé d'avoir commandité un meurtre aux Etats-Unis et extradé plaide non coupable

Un membre de l'organisation nationaliste indienne United Hindu Front brandit une photo de Gurpatwant Singh Pannun, un dirigeant séparatiste sikh recherché pour "terrorisme et sédition" par les autorités indiennes, lors d'une manifestation à New Delhi, le 24 septembre 2023 (Arun SANKAR)
Un membre de l'organisation nationaliste indienne United Hindu Front brandit une photo de Gurpatwant Singh Pannun, un dirigeant séparatiste sikh recherché pour "terrorisme et sédition" par les autorités indiennes, lors d'une manifestation à New Delhi, le 24 septembre 2023 (Arun SANKAR)

Un citoyen indien accusé d'avoir commandité l'assassinat d'un dirigeant séparatiste sikh à New York à l'instigation d'un agent de New Delhi a été extradé aux Etats-Unis, où il a plaidé lundi non coupable.

Nikhil Gupta, 52 ans, inculpé en novembre par la justice des Etats-Unis pour avoir commandité cette tentative d'assassinat, a été livré vendredi par les autorités tchèques, selon la police tchèque et des documents judiciaires américains.

Il a plaidé non coupable des chefs d'accusation lors de sa présentation lundi à un juge à New York, qui l'a maintenu en détention, selon ces documents. Une nouvelle audience a été fixée au 28 juin.

La justice américaine n'a pas cité nommément la cible présumée de ce projet, mais Gurpatwant Singh Pannun, un avocat fondateur de l'organisation américaine Sikhs For Justice (SFJ) qui revendique un Etat indépendant pour cette minorité dans le nord de l'Inde, a confirmé en novembre qu'il s'agissait de lui.

"J'ai toute confiance dans le système judiciaire américain pour que non seulement Gupta, l'exécutant, mais aussi tous ces responsables indiens qui l'ont engagé rendent des comptes pour ce projet d'assassinat commandité", a réagi Gurpatwant Singh Pannun dans un communiqué.

Il a cité nommément trois hauts responsables des services de sécurité indiens "agissant sur les ordres du Premier ministre Narendra Modi", qu'il a accusé de mener une campagne de "répression transnationale" contre les séparatistes sikhs à travers le monde.

Il faisait référence au phénomène de projection par les régimes autoritaires de leur contrôle sur leurs citoyens hors de leurs frontières, apparu au grand jour avec l'assassinat du journaliste Jamal Khashoggi au consulat saoudien à Istanbul en octobre 2018, et en expansion constante, selon les défenseurs des droits humains.

- Assassinat d'un dirigeant sikh au Canada -

Selon l'acte d'accusation, un agent du gouvernement indien (identifié uniquement par des initiales) a recruté Nikhil Gupta, résidant en Inde et impliqué dans des trafics de drogue et d'armes, pour assassiner "la victime", en échange de l'abandon de poursuites pénales contre lui.

Nikhil Gupta avait été arrêté à l'aéroport de Prague le 30 juin 2023, sous le coup d'une demande d'extradition émise par le ministère américain de la Justice. La Cour constitutionnelle tchèque a donné son feu vert à l'extradition en mai.

Le Premier ministre Modi, qui vient d'être réélu pour un troisième mandat, s'était engagé à "examiner" l'affaire dans une interview en décembre 2023.

Le ministère indien des Affaires étrangères avait auparavant indiqué avoir constitué une commission d'enquête "de haut niveau".

Selon les agences de renseignement américaines, le projet d'assassinat avait été approuvé par le plus haut responsable indien de l'espionnage à l'époque, Samant Goel, a rapporté le Washington Post en avril.

Une affaire similaire au Canada empoisonne les relations entre Ottawa et New Delhi.

En mai, le Canada a arrêté et inculpé quatre ressortissants indiens pour leur rôle présumé dans l'assassinat, en 2023, de Hardeep Singh Nijjar, un dirigeant sikh séparatiste, à Vancouver.

Nijjar, qui avait immigré au Canada en 1997 et en était citoyen depuis 2015, plaidait en faveur d'un État sikh indépendant de l'Inde, le Khalistan.

Recherché par les autorités indiennes pour des faits présumés de "terrorisme" et de complot en vue de commettre un meurtre - des accusations qu'il a rejetées - Nijjar a été abattu le 18 juin 2023 devant le temple sikh qu'il dirigeait dans la banlieue de Vancouver.

Le Premier ministre canadien Justin Trudeau avait incriminé en septembre les services de renseignements dans cet assassinat.

L'Inde a qualifié ces accusations d'"absurdes" et a limité pendant un temps les visas pour les Canadiens et poussé Ottawa à rappeler ses diplomates.

frj-sst/pno