"Vous imaginez si on enlève le mot 'gros' dans Astérix?": Anne Goscinny critique la réécriture de Roald Dahl

"Si on commence à changer les mots, à quel moment on commence à changer l’histoire?". La romancière française Anne Goscinny, fille de René Goscinny, s'indigne ce jeudi dans Le Parisien de la décision de l'éditeur britannique de Roald Dahl, qui a annoncé la réécriture de certains passages des classiques du célèbre écrivain, jugés offensants.

Pour l'écrivaine et ayant droit de l'œuvre de son père, René Goscinny à qui l'on doit Astérix, Lucky Luke, Iznogoud ou encore Le Petit Nicolas, le choix de l'éditeur de Roald Dahl est "choquant".

"Les textes sont les reflets d’une époque et d’une réalité. (...) Vous imaginez si on enlève le mot 'gros' dans 'Astérix'? Si Obélix est gros, ce n’est pas pour blesser mais pour faire rire…", a-t-elle explique .

Et d'ajouter: "Si vous avez un personnage qui est gros et que vous enlevez le mot, c’est finalement plus stigmatisant puisque vous n’osez même plus l’écrire…"

Pas de révision des éditions françaises

Le quotidien britannique Daily Telegraph a révélé vendredi dernier que les ayants droit de Roald Dahl avaient entrepris de lisser certains mots faisant référence au poids, à la santé mentale, à la violence, ou aux questions raciales ou de genre de tous les romans pour enfants de l'auteur.

Ainsi, le terme "gros" n'est plus employé pour décrire Augustis Gloop de Charlie et la Chocolaterie. Les "hommes-nuages" de James et la Pêche géante deviennent le "peuple nuage". Des changements qui ont indigné de nombreuses personnalités au Royaume-Uni.

De son côté, l'éditeur français de Roald Dahl, Gallimard, a assuré mardi qu'il laisserait intacts les textes des livres jeunesse de l'auteur britannique.

"Il ne faut pas supprimer les mots ou les remplacer"

Face à ces changements, Anne Goscinny rassure les lecteurs des œuvres de son père: si critiques un jour il y a sur le contenu de ces ouvrages, elle s'assura que de telles réécritures n'aient jamais lieu.

"Moi vivante, on n’y touchera pas une virgule", affirme-t-elle.

"Les successeurs de mon père au scénario, à commencer par Albert Uderzo, ont toujours respecté sa grammaire", explique Anne Goscinny. "Ce n’est pas pour qu’une bande de farfelus et un courant démagogique viennent bouleverser cela aujourd’hui."

Et de conclure: "Je m’opposerai toujours aux incitations à la haine, au racisme, à l’homophobie en général et dans la littérature en particulier. Même dans ces cas-là, il ne faut pas supprimer les mots ou les remplacer. Il faut au contraire s’en servir et montrer aux enfants que c’est monstrueux. Ce n’est pas en effaçant qu’on peut éduquer les enfants. Mais en expliquant."

Article original publié sur BFMTV.com