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Œillères

Voilà un livre que toute la gauche doit lire d’urgence, si ce n’est déjà fait. Non pas pour en épouser forcément les thèses politiques, parfois gênantes. Mais pour se colleter sans œillères ni préjugés bien-pensants avec cette réalité d’évidence : le peuple, le plus souvent, n’est plus avec la gauche. Le peuple ? Une grande partie, en tout cas, des ouvriers et des employés, de plus en plus attirés par le vote-coup de balai que propose le Front national. Bien sûr les thèses de Christophe Guilluy sont contestées par d’autres géographes ou par des sociologues spécialistes des mêmes sujets. Ce n’est pas parce qu’on est iconoclaste qu’on a toujours raison. Mais le sentiment d’abandon ressenti par la «France périphérique» décrite par le géographe est indiscutable. Il s’agit d’économie, de social, mais aussi de symboles. Les bobos accueillent avec faveur les signes culturels - mélangés, cosmopolites, métissés - liés à la mondialisation. La France périphérique beaucoup moins bien. Fallait-il tenir pour négligeable, néfaste ou risible l’héritage national, alors même qu’on célèbre, au même moment, ces héros - patriotes, justement - que furent Jean Moulin, les insurgés de la Libération ou les hommes et les femmes de la France libre ? Exemple parmi d’autres… Guilluy surestime sans doute ce besoin identitaire si agréable aux oreilles frontistes et en tire des leçons politiques parfois inquiétantes. Faut-il pour autant le sous-estimer ? Il y a là un examen de conscience politique et culturel à ouvrir, loin des conformismes et des pensées automatiques.

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Guilluy, le Onfray de la géographie
«Certes la mondialisation transforme la géographie des inégalités, mais…»
«Les zones de pauvreté existent aussi au sein des métropoles»
«Si la politique de la ville était un succès, ce serait un scoop»
Le FN à Brignoles, pas si simple